Bruxelles, 2 octobre 2025
En cette année internationale des coopératives, promues par les Nations Unies, il faut tout d’abord souligner l’importance du COOPDAY sur le plan de la pédagogie : mieux connaître et faire connaître l’importance fondamentale de la dynamique des entreprises coopératives, ainsi que de l’économie sociale et solidaire, constitue un enjeu majeur [1].
Personnellement, j’ai toujours considéré que l’économie coopérative s’inscrivait pleinement dans le champ de l’économie productive. La pertinence de cet ancien instrument que constitue la coopérative peut encore répondre aux défis du XXIe siècle. Elle est même particulièrement importante à notre époque et devrait l’être davantage à l’avenir en Wallonie.
Dans sa contribution, Sébastien Durieux, membre du Comité de direction de Wallonie Entreprendre, a montré que, dans le système d’innovation et le paysage du redéploiement de la Wallonie, l’économie coopérative a pleinement sa place. C’est également mon message : pourquoi faut-il répondre maintenant à ce besoin d’accroissement et de développement des coopératives ?
1. L’économie coopérative ouvre la porte à un entrepreneuriat alternatif
D’abord parce que, qu’on le veuille ou non, malgré tous les efforts des gouvernements, des administrations, des associations patronales et sectorielles, des fondations et des universités, l’esprit d’entreprendre reste faible en Wallonie et même, dans certaines sous-régions, marginal. Les traumatismes des déclins industriels ont marqué des générations. Il faudra probablement quelques décennies supplémentaires pour guérir les plaies culturelles et psychologiques qui subsistent. Les témoignages sont légion [2]. Or, on l’a répété, l’entrepreneuriat collectif constitue une alternative au modèle capitaliste classique tel qu’il a été décrit par Adam Smith au XVIIIe siècle. Les coopératives mettent en œuvre un vrai entrepreneuriat capable de produire de la valeur – pas uniquement au sens large, au sens le plus restreint également – et de la diffuser. Elles offrent de surcroît la possibilité de mise en commun d’un capital humain et financier ainsi que l’application de règles spécifiques en termes de propriété et de gouvernance [3]. Cela peut se faire évidemment par toute une série de mécanismes d’accompagnement qui existent et qui ont été développés par les gouvernements wallons successifs et leur administration [4].
2. La contribution à une économie créatrice de valeur au sens restreint
Ensuite, parce que la transition coopérative, les coopératives, l’économie sociale et solidaire, constituent vraiment une alternative pour des services d’intérêt général, où elles peuvent remplir des missions économiques, sociales, culturelles, avec une forte implication, une motivation particulière du personnel, tout en se situant dans le sens de la création de valeur, donc de l’activité économique productive.
En Wallonie, cette question est fondamentale puisque, nous le savons, depuis les années 1990, notre économie souffre d’un déficit d’emplois productifs, créateurs de valeur au sens de la taxe sur la valeur ajoutée, entre 80.000 et 100.000 emplois. Et il ne s’agit pas simplement d’une question de taux d’activité. Il s’agit de pouvoir, comme le veut le Rapport Brundtland Notre Avenir à tous (1987) sur la durabilité, la soutenabilité, disposer d’une économie qui dégage des excédents. Seuls ceux-ci peuvent permettre à l’État, par la fiscalité, d’adresser les défis fondamentaux qui sont les nôtres : décarbonation, production et infrastructures d’énergie, cohésion sociale, santé, coopération au développement, défense et lutte contre la criminalité, rééquilibrage du fédéralisme belge [5]. Pour ce dernier enjeu, il s’agit de mettre fin aux transferts Nord-Sud de la Belgique par la création de ces emplois [6] et de rendre sa dignité à la Wallonie [7].
Notons toutefois que, sur le temps long 1995 à 2023, alors que la population wallonne s’accroît de 11,4%, l’emploi total s’accroît quant à lui de 29%. Alors que le nombre d’indépendants reste assez stable (+7,3%), le nombre d’emplois dans la fonction publique augmente de 24%. Néanmoins, le nombre de personnes travaillant dans les entreprises passe de 514.740 à 769.194, soit un accroissement de près de 50% (49,4%) [8].
Parmi ces défis, il est également fondamental de répondre à celui de la recherche de sens, de l’intérêt général et du bien commun rappelé par notre collègue finlandais. Ce besoin touche bien sûr les jeunes, mais est également devenu transgénérationnel et concerne toutes les sphères de la société. Il s’agit également de recréer du narratif débouchant sur des projets concrets et sur leur réalisation, comme l’a rappelé Victor Meseguer Sánchez, directeur général adjoint de la coopérative ABACUS, dans sa remarquable présentation de ce superbe instrument éducatif catalan [9].
3. Un « moment coopératives »
Enfin, nous avons besoin de poursuivre notre effort parce qu’il existe aujourd’hui en Wallonie un « moment coopératives », un moment favorable à la transition coopérative lié aux métiers du futur. Certes, rien de plus difficile que la prospective des métiers et des compétences nécessaires pour identifier les domaines, s’y former et devenir capable de pratiquer au quotidien. Les travaux pour ce type de prospective sont nombreux et l’intérêt est grand [10]. Au Québec, les rectrices et les recteurs des universités, ainsi qu’une série d’acteurs clefs, lancent d’ailleurs actuellement un vaste Plan Talents pour rencontrer cette question et y faire face.
Si je vous dis : aide aux personnes, soins à domicile, accueil de l’enfance, politique d’égalité des chances, politique de la santé, aménagement du territoire, protection de l’environnement, économie circulaire, matériaux, politique de l’énergie, rénovation rurale, logement et habitat, activités parascolaires, services psycho-médico-sociaux, politique de la jeunesse, éducation permanente et animation culturelle, développement rural, soutien à la recherche d’emploi, économie sociale… Voilà autant de domaines et de métiers où se déploient des coopératives…
En fait, il s’agit de champs d’action actuels, tels que les identifie le cadastre des APE, des aides à l’emploi 2024, établi par le Forem en vertu du décret du 6 juin 2021, sous la rubrique « compétences fonctionnelles et activités d’intérêt général » [11].
À l’heure où la Déclaration de Politique régionale wallonne, engageant le Gouvernement wallon et le ministre wallon de l’Économie en particulier, a pris la décision de renvoyer 50 voire 60.000 équivalents temps plein APE vers les départements fonctionnels de la Région wallonne et de la Communauté française, le moment est essentiel pour faire entrer une bonne partie de ces emplois dans le champ de l’économie sociale et solidaire, coopérative et productive.
Ruslan Batiuk – Dreamstime
Certes, je n’ignore pas, à la lecture de ce cadastre, qu’un certain nombre des emplois mentionnés dépendent déjà de nombreuses coopératives, mais beaucoup de ces emplois sont inscrits sur le payroll d’ASBL et d’administrations publiques communautaires, régionales, provinciales ou communales, donc souvent hors du champ productif tel que je l’ai évoqué, au sens restreint. C’est là qu’une formidable opportunité existe d’établir une véritable mutation de notre économie.
Je n’ignore pas non plus la difficulté de cette transition. Assurément, elle ne se fera pas toute seule : des mécanismes, des sas, des dispositifs innovants devront être mis en place par tous les acteurs concernés, mais l’occasion est réelle de rééquilibrer et redynamiser l’économie régionale.
4. Conclusion : dire et faire…
Le rapport prospectif 2025, Résilience 2.0 de la Commission européenne, publié en ce mois de septembre 2025, contient deux affirmations que je veux mettre en exergue. La première concerne l’État-providence : pour que l’État-providence subsiste, il faut des finances publiques viables, une économie productive et compétitive [12].
La seconde porte sur la résilience et le renouveau démocratiques [qui] ont leurs racines dans la cohésion sociale, dans les mécanismes institutionnels d’équilibre des pouvoirs et dans l’innovation visant à améliorer la démocratie et la démocratie des entreprises [13].
L’articulation de ces deux affirmations, qui touchent à notre souveraineté [14], ne va pas de soi, notamment si on regarde l’évolution des tendances dans la démographie de l’emploi. En effet, le même rapport met en évidence que, en 2040, l’Union européenne pourrait compter 17 millions de personnes en moins en âge de travailler qu’aujourd’hui [15]. Je vous laisse imaginer les impacts sur la compétitivité, les pressions sur le marché du travail et sur les budgets publics, en les liant avec des fiscalités lourdement secouées.
Le développement du modèle coopératif ne répondra pas à l’ensemble de ces défis, mais, en tout cas, pour la Wallonie, j’ai la conviction qu’il peut contribuer, de manière tangible, à une refonte et à un accroissement des systèmes productifs et de l’économie productive en Wallonie. Cette hypothèse demande, à tout le moins, une sérieuse et rapide évaluation ex-ante voire une analyse préalable d’impact.
Quelque chose se passe, disait la présidente de la Febecoop, Hilde Vernaillen en ouverture du COOPDAY à Bruxelles ce 2 octobre 2025. En tout cas, il me semble qu’en Wallonie, quelque chose peut se passer à un moment particulier : transformer une économie soutenue – celle des APE – en économie portante – celle des entreprises coopératives.
Le dire est facile, le faire pourrait être enthousiasmant…
Philippe Destatte
@PhD2050
[1] Ce texte constitue la mise au net de mon intervention dans le panel Région wallonne du COOPDAY organisé par la Febecoop au Centre culturel Flagey à Bruxelles le 2 octobre 2025, aux côtés de Sébastien Durieux et de Fabrice Collignon.
[2] Voir, par exemple, le propos d’Emmanuelle Ghislain, CEO de Pulse Foundation : L’inconfort (pour ne pas dire le rejet) de certaines des parties prenantes du système éducatif francophone envers les critères de « création de valeur », pourtant à la base de la démarche entrepreneuriale, freine son bon déploiement. Il est encore bien difficile de faire cohabiter valeur économique et sociale dans les esprits. Emmanuelle GHISLAIN, Diffuser l’esprit d’entreprendre au 1,1 million des « 6-25 ans » de notre communauté ne peut s’envisager que si l’enseignement s’approprie pleinement cette compétence, dans L’Écho, 28 octobre 2023. https://www.lecho.be/opinions/general/comment-cultiver-l-esprit-d-entreprendre-aupres-des-jeunes/10502329.html – Voir également les données régionales dans J. DE MULDER & H. GODEFROID, Comment stimuler l’entrepreneuriat en Belgique ?, Bruxelles, Banque nationale de Belgique, 2016. https://www.nbb.be/fr/media/22103 – Béatrice VAN HALPEREN, Esprit d’entreprendre et entrepreneuriat en Wallonie : Contexte et développements récents, dans Dynamiques régionales, 7 (1), 2019, p. 5-12. https://shs.cairn.info/revue-dynamiques-regionales-2019-1-page-5?lang=fr
Voir aussi : Olivier MEUNIER, Mathieu MOSTY et Béatrice VAN HALPEREN, Les mesures de sensibilisation à l’esprit d’entreprendre : quel impact sur les élèves de l’enseignement secondaire supérieur ?, IWEPS, Rapport de recherche n°22, Décembre 2018. https://www.iweps.be/publication/mesures-de-sensibilisation-a-lesprit-dentreprendre-impact-eleves-de-lenseignement-secondaire-superieur/
La Wallonie présente une tendance à la hausse du nombre de créations d’entreprises, bien qu’elle soit moins marquée que celle de la Flandre. Le nombre de nouvelles entreprises est passé de 21.868 en 2014 à 25.718 en 2023, soit une augmentation d’environ 17,6%. Robin DEMAN, Charlie TCHINDA et Eric VAN DEN BROELE, Atlas du créateur 2024, Graydon, UNIZO, UCM, 2024, p. 13. https://www.ucm.be/actualites/starteratlas-2024-le-nombre-de-cessations-dentreprises-atteint-des-records Il serait probablement nécessaire de mettre à jour le Global Entrepreneurship Monitor (GEM) qui mesure l’intention d’entreprendre ou encore l’esprit d’entreprendre d’un pays ou d’une région à partir d’un échantillon représentatif de cette population, pour la Wallonie.
https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=47205DE
[3] Thomas LAMARCHE & Jérémie BASTIEN, Méso-économie, Penser la pluralité des dynamiques économiques, p. 115-125, Paris, Dunod, 2025.
[4] Voir, par exemple, Le soutien de l’entrepreneuriat des jeunes, une des ambitions de Wallonie Entreprendre, Liège, WE, 17 avril 2024. https://www.wallonie-entreprendre.be/fr/actualites/accompagnement/le-soutien-de-lentrepreneuriat-jeune-une-des-ambitions-strategiques-de-wallonie-entreprendre
[5] Le Rapport Brundtland (1987) sur le développement durable insiste sur la nécessité de construire un système économique capable de dégager des excédents. Or, en Wallonie, dès 1991, l’économiste Henri Capron (ULB-DULBEA) montrait, dans le cadre des travaux La Wallonie au futur, que le secteur public était devenu l’activité dominante en Wallonie, supplantant ainsi l’activité industrielle. En effet, en 1989, l’emploi salarié par rapport à la population était de 6,47 % en Wallonie (contre 5,46 % en Flandre) tandis que l’emploi manufacturier, qui avait chuté de 12,8 % les quatre dernières années, était au niveau de 5,41 % contre 7,83 % en Flandre. Le Professeur Capron mettait également en évidence la vulnérabilité de la Wallonie qui ne disposait plus que d’une base industrielle très faible et la nécessité pour la région de développer une véritable stratégie industrielle tant par une consolidation de ses acquis, que par une plus grande diversification. Pour ce faire, il insistait sur l’importance de la revitalisation qui devrait se fonder sur des pôles de compétitivité technologique structurants. Parallèlement, et à la suite des recherches d’Albert Schleiper (CUNIC), pilotant un groupe d’économistes régionaux, ces travaux mettaient en évidence l’importance du secteur non marchand par rapport au secteur marchand, proportionnellement plus élevé que dans le reste de la Belgique, en raison de la réduction excessive ou de la croissance trop faible des emplois dans le secteur marchand. Ces travaux montraient que les activités non marchandes, concentrées dans les deux secteurs « Services publics, enseignement » et « Services divers », représentaient ensemble 43,7 % de l’emploi salarié wallon (351.286 emplois sur 804.553) et 32,3 % de l’emploi total du côté flamand. Ce différentiel de plus de 10 % représentait un déficit de plus de 90.000 emplois dans le secteur marchand wallon. Le groupe de travail arrivait à la conclusion que l’évolution de l’activité économique à l’horizon 2010 impliquait une répartition de l’emploi entre les divers secteurs compatibles avec la finalité des activités économiques, à savoir la création de richesse, ce qui, à court et à moyen terme, nécessite une importante croissance nette de l’emploi dans les secteurs industriels et tertiaires marchands. Henri CAPRON, Réflexions sur les structures économiques régionales, dans La Wallonie au futur, Le défi de l’éducation, p. 176-177, Charleroi, Institut Destrée, 1992.La Wallonie au futur, Le défi de l’éducation, p. 130sv, Charleroi, Institut Destrée, 1992. – Albert SCHLEIPER, Le devenir économique de la Wallonie, dans La Wallonie au futur, Le défi de l’éducation, p. 131-133, Charleroi, Institut Destrée, 1992. – Ph. DESTATTE, La Wallonie au futur, 10 ans de construction d’un projet de société, p. 20, Charleroi, Institut Destrée, 1997.
[6] Didier PAQUOT, Trajectoire des transferts financiers interrégionaux Flandre-Wallonie, Namur, Institut Destrée, 28 février 2021, 12 p.
[7] Ph. DESTATTE, « J’aurais honte, en tant qu’élu wallon, d’encore demander de l’argent à la Flandre », Entretien avec Han Renard, Traduction de l’interview réalisée par la journaliste Han Renard le 1er février 2023 et publiée dans le magazine Knack le 4 février 2023 sous le titre Historicus Philippe Destatte: “Ik zou me als Waalse politicus schamen om nog geld te vragen aan Vlaanderen”, Hour-en-Famenne, Blog PhD2050, 1er février 2023. https://phd2050.org/2023/02/05/dignite/
[8] Banque nationale, ICN, Répartition de l’emploi par secteurs institutionnels et STATBEL, calculs propres 30 septembre 2025.
[9] ABACUS Cooperativa : https://www.abacus.coop/es/home
[10] Philippe DESTATTE, Les métiers de demain… Question d’intelligence(s), Blog PhD2050, 24 septembre 2018. https://phd2050.wordpress.com/2018/09/24/helmo2018/ – Ph. DESTATTE, L’évolution des compétences et des métiers, et ceux qui viendront demain, Mission Prospective Wallonie 21, Namur, Institut Destrée, 2021. – Assessing and Anticipating Skills for the Green Transition: Unlocking Talent for a Sustainable Future, Getting Skills Right, Paris, OECD, 2023.OCDE
[11] Aide à l’Emploi (APE), FOREM, 2025. https://www.leforem.be/entreprises/aides-financieres-aides-promotion-emploi.html
[12] Rapport de prospective stratégique 2025, Résilience 2.0 : donner à l’UE les moyens de prospérer malgré les turbulences et les incertitudes, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Strasbourg, 9 septembre 2025, COM (2025) 484 final, p. 11. – Philippe DESTATTE, Finances wallonnes : il faut poursuivre et accentuer la trajectoire Hilgers…, Blog PhD2050, Namur, 12 mai 2024 https://phd2050.org/2024/05/12/hilgers/
[13] Rapport de prospective stratégique 2025, Résilience 2.0…, p. 14. – Ph. DESTATTE, La cohésion sociale pour la Wallonie à l’horizon 2050, De la citoyenneté belge à la concitoyenneté wallonne, Communication au Palais des Congrès de Namur à l’occasion de la journée « 30 ans au service de la cohésion sociale en Wallonie » organisée par la direction de la Cohésion sociale du Service public de Wallonie. Namur, Blog PhD2050, 1er décembre 2022. https://phd2050.org/2022/12/04/concitoyennete/ – Voir aussi : Ph. DESTATTE, Système, enjeux de long terme et vision de la cohésion sociale en Wallonie à l’horizon 2050, dans L’Observatoire, Hors-série, Liège, Mai 2023, p. 35-41.
[14] François ECALLE, Mécomptes publics, Conception et contrôle des politiques économiques depuis 1980, p. 307, Paris, Odile Jacob, 2025.
[15] Op. cit, p. 11. – Choosing Europe’s future. Global trends to 2040,EC, ESPAS, 2024, https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/848599a1-0901-11ef-a251-01aa75ed71a1/language-en – Annual report on taxation 2025, Review of taxation policies in the EU Member States, European Commission, 2025, https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/998524d7-4fe5-11f0-a9d0-01aa75ed71a1/language-en. – 2024 Ageing Report. Economic and Budgetary Projections for the EU Member States, European Commission, April 18, 2024. https://economy-finance.ec.europa.eu/publications/2024-ageing-report-economic-and-budgetary-projections-eu-member-states-2022-2070_en










