L’attention que j’ai portée aux questions du fédéralisme et du confédéralisme depuis plus de trente ans [1] est d’abord professionnelle : j’ai commencé à expliquer à des étudiants en 1980 que le fédéralisme était une doctrine préconisant une certaine liberté d’action des parties associées, combinée à une unité d’ensemble, plutôt qu’un dogme de division. Je continue à le faire aujourd’hui, notamment à l’École de Droit de l’Université de Mons. Parallèlement, le fédéralisme est devenu chez moi la meilleure réponse aux difficultés de répondre aux enjeux d’un pays complexe et la meilleure manière d’organiser l’État pour répondre à ses enjeux de manière pacifique. Cette conviction je l’ai acquise en fréquentant, écoutant, lisant François Perin, Jean-Maurice Dehousse, Jacques Hoyaux, Robert Collignon, Jacques Brassinne, Philippe Suinen, Karl-Heinz Lambertz et quelques autres…
Au-delà de la mécanique fédéraliste et de toutes ses variantes, il reste toujours pour moi une interrogation de l’ancien secrétaire général de la Commission européenne, Émile Noël, que j’ai connu comme président de l’Institut européen de Florence dans les années 1990. J’avais eu l’occasion de l’accueillir à Liège en 1995 pour un colloque européen. À cette occasion, celui qui était alors président du Centre de Formation européenne (CIFE) de Nice avait posé cette question fondamentale : la structure fédérale contribue-t-elle véritablement à l’épanouissement culturel, au dynamisme politique, au développement économique ? [2]
Ce doute, je ne suis pas le seul à le partager aujourd’hui. Une classe politique tout entière s’interroge, qui semble à la fois déconnectée du passé, victime d’amnésie et frappée d’effroi, celui qui empêche d’avancer dans l’avenir. Et j’ai de surcroît l’impression que de nombreux experts, politologues et constitutionnalistes sont figés dans des postures qui les empêchent eux aussi de franchir le pas vers l’avenir, et qu’ils participent à ce que Michel Crozier appelait “une société bloquée”.
Dans un débat organisé par Henri Goldman à paraître dans le numéro de septembre 2020 de la revue Politique, j’ai eu l’occasion d’échanger avec Philippe Van Parijs et Hugues Dumont sur l’évolution institutionnelle de la Belgique. Après ces échanges cordiaux que l’on découvrira dans peu de temps, j’ai voulu lever quelques ambiguïtés et rendre claire ma position en sept points.
Je défends pour la Belgique un projet – que j’appelle fédéraliste – de quatre entités fédérées – des régions-communautés distinctes et territorialisées – intitulées Flandre, Bruxelles, OstBelgien et Wallonie, disposant des mêmes droits, des mêmes devoirs et des mêmes compétences, ainsi que nous le présentons avec Jacques Brassinne depuis 2007 [3].
Comme le constitutionnaliste Fernand Dehousse – qui n’était pas un Flamand – l’a fait de 1938 à la fin de sa vie, au milieu des années 1970, je persiste à considérer que le confédéralisme n’est somme toute qu’une forme différente de fédéralisme [4].
Si on veut appeler cela du confédéralisme et que cela fait plaisir aux partis politiques flamands qui ont tous – sauf le Belang et le Partij van de Arbeid – prôné cette formule confédérale à un certain moment, je n’y vois pas d’inconvénient : bien sûr, mon (con)fédéralisme à moi est à quatre composantes, à statut égal.
De plus en plus, je pense que notre exécutif et notre législatif, au niveau fédéral, doivent abandonner un nationalisme désuet et dépassé, que quelques masques tricolores de mauvais goût ne parviendront pas à ranimer, et s’emparer de la formule que le professeur Élie Baussart exposait déjà en 1928 : “la Flandre et la Wallonie ne sont pas faites pour la Belgique, la Belgique est faite pour la Flandre et la Wallonie. Comme l’État, observait-il, est fait pour le citoyen et non le citoyen pour l’État” [5]. Sans doute, en 2020, aurait-il ajouté les entités de Bruxelles et de l’OstBelgien.
Comme nous l’avions affirmé avec mon collègue historien de l’Université d’Anvers Marnix Beyen, en conclusion générale de la Nouvelle Histoire de Belgique (1970-2008), une fédération simplifiée et transparente aurait pour vertu d’augmenter l’attachement des citoyennes et des citoyens aux structures politiques, sans pour autant les exclure des identités multiples. Dans une telle configuration, l’identité belge ne reposerait plus en premier lieu sur des sentiments négatifs[6].
Car, c’est un autre Dehousse – Franklin – petit fils de Fernand et fils de Jean-Maurice, ces deux réformateurs wallons de l’État belge, qui le constate avec force et raison aujourd’hui, ce 18 août 2020 : la Belgique est malade de sa mauvaise gestion publique – et de la particratie – bien plus que du fédéralisme [7].
Les outils existent, tant pour soigner les plaies d’un État inachevé que celles de sa gestion chaotique. Au lieu de maudire les élues et les élus ainsi que les experts, il appartient aux citoyennes et aux citoyens de se saisir des enjeux de la Cité. Initiative de l’Observatoire québécois de la Démocratie de l’UQAM, l’Université d’été de la participation citoyenne et de la gouvernance démocratique en Wallonie et au Québec l’a bien montré en cette troisième semaine d’août 2020 : la santé démocratique d’un pays ne peut aujourd’hui se fonder que sur l’interaction constante entre, d’une part, une représentation solide d’élus déterminés à chercher le bien commun et, d’autre part, l’implication et l’expertise citoyennes que les parlements et autres assemblées nationales se doivent de mobiliser.
Il ne s’agit plus de gadgets pour faire semblant, mais d’innovations sociales et de contrôle démocratique.
Philippe Destatte
@PhD2050
[1] Notamment : Ph. DESTATTE, Séparation, décentralisation fédéralisme, La pensée régionaliste de Jules Destrée (1895-1936), Bruxelles, Direction générale de l’Enseignement, de la Formation et de la Recherche de la Communauté française, 1988. – Ph. DESTATTE, La Wallonie : une entité fédérée ? dans La Wallonie, une Région en Europe, coll. Études et documents, p. 382-392, Nice – Charleroi, Cife – Institut Destrée, 1997. – Ph. DESTATTE dir., Le fédéralisme dans les États-nations, Regards croisés entre la Wallonie et le monde, Bruxelles, Presses interuniversitaires européennes, 1999. – Ph. DESTATTE, Bruxelles, la Flandre et la Wallonie, un nouveau paradigme pour la Belgique ? dans Fédéralisme : stop ou encore ? p. 113-120, Numéro spécial des Cahiers marxistes, octobre-novembre 2000. https://phd2050.org/2020/08/21/resurgence-paradigme/ – Ph. DESTATTE, Le (con)fédéralisme en Belgique n’est pas un problème, c’est une solution, conférence (Con)federalism: cure or curse, Rethinking Belgium’s institutions in the European Context, 11th public event of the Re-Bel initiative, Fondation universitaire, Bruxelles,19 juin 2014. Blog PhD2050, 14 juillet 2014. https://phd2050.org/2014/07/14/confederalisme/ – Ph. DESTATTE, Quel avenir pour le fédéralisme belge ?, in Die Besonderheiten des belgischen Bundesstaatsmodells und ihre Auswirkungen auf die Rechtsstellung der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Beiträge zum Kolloquium vom 16. September 2016 im Parlament der Der Deutschsprachigen in Eupen, Scriftenreihe derDeutschsprachigen Gemeinschaft, Band 3, 63-69, 2017. – Ph. DESTATTE, Le confédéralisme, spectre institutionnel, Blog PhD2050, Institut Destrée, Working Paper, 31 p., 28 décembre 2019, http://www.institut-destree.eu/wa_files/philippe-destatte_confederalisme_spectre-institutionnel_consolide_2019-12-31.pdf
[2] Ph. DESTATTE, A Émile Noël, La Wallonie, une Région en Europe, p. 9, Nice – Charleroi, Cife – Institut Destrée, 1997.
[4] Notamment : Fernand DEHOUSSE et Georges TRUFFAUT, L’État fédéral en Belgique, p. 15, Liège, Éditions de l’Action wallonne, 1938. – Fernand DEHOUSSE, Les projets fédéralistes de 1938 à nos jours, dans Jacques LANOTTE éd., L’histoire du mouvement wallon, Journée d’étude de Charleroi, 26 février 1976, p. 27, Charleroi, Institut Destrée, 1978.
[5] Elie BAUSSART, 1930 verra-t-il la faillite de 1830 ?, dans La Terre wallonne, Octobre 1928, p. 24.
[6] Marnix BEYEN et Philippe DESTATTE, Un autre pays, Nouvelle histoire de Belgique 1970-2000, [volume 9 de la Nouvelle Histoire politique de la Belgique contemporaine de 1830 à nos jours, sous la direction de Michel Dumoulin, Vincent Dujardin et Mark Van den Wijngaert], coll. Histoire, p. 395, Bruxelles, Le Cri, 2009.
[7] Franklin DEHOUSSE, La Belgique, malade de sa mauvaise gestion publique bien plus que du fédéralisme, dans L’Écho, 18 août 2020, p. 9.
A plusieurs reprises, en ce début 2020, l’occasion m’a été donnée de valoriser l’idée de réunir un Congrès national [1], piste préconisée en novembre 2019 par le professeur de droit constitutionnel Hugues Dumont [2] pour trouver une solution à l’impasse institutionnelle belge.
La crise du Covid-19 ne doit pas servir de prétexte à abandonner toute réflexion sur l’avenir et surtout à considérer que, face au pire, ce qui n’allait pas avant ira mieux demain. Aujourd’hui comme hier, penser à réformer l’État belge vise à améliorer son efficience et à décrisper les relations entre ses communautés et régions.
La convocation d’un Congrès national fait référence à une procédure qui est fondatrice de l’État belge aux tournants de 1830 et 1831. Moins connu que la Muette de Portici, que les Journées de Septembre ou que la prestation de serment de Léopold sur la Constitution, la réunion du Congrès national belge fut à son époque l’occasion de véritables nouveautés politiques. À l’aube de la création de l’État belge, cette assemblée introduisit dans le corps politique, pour le rajeunir et le vivifier, des innovations que les autres peuples du continent entrevoyaient à peine dans l’avenir [3]. Aussi, au XXIe siècle, peut-il constituer un modèle pour les générations nouvelles.
Séance du Congrès national – Gouache de Jean-Baptiste Madou (1796-1877) MRBA
«[…] considérant qu’il importe de fixer l’état futur de la Belgique »
Les combats des Journées de Septembre 1830, qui ont vu l’armée du roi Guillaume d’Orange chassée de Bruxelles, sont à peine terminés que le Gouvernement provisoire proclame l’indépendance de la Belgique. Dans cet arrêté daté du 4 octobre 1830, le gouvernement provisoire, considérant qu’il importe de fixer l’état futur de la Belgique, annonce qu’il va prendre l’initiative d’un projet de Constitution et convoquer un Congrès national pour examiner ce projet et le rendre, comme constitution définitive, exécutoire dans toute la Belgique [4]. Immédiatement, des élections sont convoquées pour former la Constituante, ellipse d’Assemblée constituante, qui aura tant la fonction d’écrire la Constitution que la fonction législative en attendant la mise en place des institutions qu’elle créera. En octobre 1830, il s’agit bien sûr de légitimer l’action révolutionnaire, à l’instar de ce qui fut fait à Versailles le 9 juillet 1789 [5] . Comme l’indiquait l’historienne Els Witte, le nom choisi pour cette assemblée constituante : Congrès national en français et Volksraad en néerlandais, est symbolique [6].
Deux jours après l’annonce de cette convocation, le 6 octobre 1830, les chefs révolutionnaires belges nomment une Commission de Constitution. Indépendamment de l’élection du Congrès national, cette commission a la mission de proposer au Gouvernement provisoire un projet de Constitution, destiné, après examen par le Congrès national, à devenir la loi fondamentale de la Belgique. Présidée par le catholique Etienne-Constantin de Gerlache (1785-1871), conseiller à la cour de Liège et ancien membre des États généraux du Royaume-Uni des Pays-Bas, elle est composée d’une douzaine de membres, principalement juristes, conseillers ou avocats. Jean-Baptiste Nothomb (1805-1881), avocat luxembourgeois et rédacteur du Courrier des Pays-Bas, est le secrétaire de cette commission.
Cinq innovations importantes
La Commission de la Constitution arrête les bases du contenu du futur document le 16 octobre 1830. Les deux plus jeunes membres, le libéral brugeois et avocat liégeois Paul Devaux (1801-1880) et Jean-Baptiste Nothomb sont chargés de rédiger un premier texte, ce qu’ils font entre le 16 et le 23 octobre [7]. La Commission adopte le document le 25 octobre. C’est ce projet qui sera distribué lors de la séance solennelle d’ouverture du Congrès national [8] et qui y sera présenté par le gouvernement, sans qu’il y ait apporté de modification [9].
Chargé par ses pairs de mettre au point les dispositions de la formation du Congrès national et d’en rédiger le texte de l’arrêté électoral, Jean-Baptiste Nothomb propose au Gouvernement provisoire d’abaisser l’âge d’éligibilité à 25 ans – ce qui était en fait l’âge qu’il avait à ce moment – au lieu des 30 ans en usage dans le Royaume-Uni des Pays-Bas en vertu de la Loi fondamentale. Première innovation majeure, c’est cet âge d’éligibilité de 25 ans accomplis le jour de l’élection qui est retenu par le Gouvernement provisoire. Cela permet, à Nothomb, comme à d’autres jeunes, de siéger au Congrès national [10].
L’arrêté du Gouvernement provisoire du 10 octobre 1830 qui détermine le mode d’élection du Congrès national y inscrit une autre innovation de taille : l’élection directe. Ainsi, les 200 députés vont être élus directement par les citoyens [11]. Pour comprendre l’importance de cette rupture, il faut se souvenir que dans le Royaume-Uni des Pays-Bas, alors que les membres de la première Chambre des États généraux étaient nommés à vie par le roi, la Seconde Chambre était désignée par les États provinciaux dont les membres tenaient leur mandat de trois ordres : les nobles, les villes et les campagnes. Dans les campagnes, l’électeur nommait directement les membres des États provinciaux, mais dans les villes, il choisissait les membres d’un collège électoral qui, par un système aussi curieux que compliqué, nommaient les membres des régences municipales (les conseillers communaux) qui, seulement, désignaient les députés aux États provinciaux [12]. Ce mécanisme échelonné, à trois ou quatre degrés, a été qualifié “d’élection à ricochet” par un des constituants, le congressiste athois Eugène Defacqz (1797-1871) [13]. On mesure dès lors à quel point l’élection directe, probablement inspirée de la loi Lainé adoptée en France le 5 février 1817, vise à s’émanciper de l’ancien régime et de ceux qui voudraient s’y accrocher.
Une troisième innovation porte sur la nationalité. L’arrêté du 10 octobre dispose que tout citoyen né ou naturalisé belge ou qui compte six années de domicile en Belgique peut être électeur, s’il répond bien sûr aux conditions de fortune [14] ou de capacité d’autonomie intellectuelle et de compréhension des enjeux [15]. Les conditions d’éligibilité en tant que député au Congrès national s’étendent à l‘indigénat. Ainsi, étaient considérés comme indigènes, tous les étrangers qui avaient établi leur domicile en Belgique avant la formation du ci-devant Royaume des Pays-Bas (c’est-à-dire avant 1815) et avaient continué à y résider [16].
Quatrième innovation introduite pour l’élection au Congrès national : il n’est pas requis que le député ait son domicile dans la province où il aura été élu [17]. En effet, si l’électeur doit voter dans le district dans lequel il est domicilié, il peut se présenter comme candidat dans tout autre district et y être élu.
Cinquième innovation, que l’ancien magistrat et professeur John Gilissen (1912-1988) qualifie, avec l’élection directe, de nouveautés radicales[18] : aux censitaires, c’est-à-dire les citoyens qui payent la quotité de contributions permettant d’être électeurs et que les règlements des villes et des campagnes ont fixée, s’ajoutaient, sans qu’il soit exigé d’eux un cens, des capacitaires. Les conseillers des cours, juges des tribunaux, juges de paix, avocats, avoués, notaires, ministres des différents cultes, officiers supérieurs depuis le grade de capitaine, docteurs en droit, en sciences, en lettres et en philosophie, en médecine, chirurgie et accouchements disposent désormais du droit de vote en vertu de leur diplôme ou de leur fonction [19].
Rajeunissement du corps électoral, élection directe, ouverture à l’ensemble des résidents présents depuis cinq ans, mobilité des candidats, vote des capacitaires, ces cinq innovations marquent l’élection du Congrès national en même temps que la volonté du Gouvernement provisoire de 1830 d’élargir sa légitimité et d’y faire adhérer un plus grand nombre d’acteurs et de citoyens.
Les élections du Congrès national ont lieu le 3 novembre 1830 : sur les 200 élus, 98 le sont dans les provinces flamandes, 75 dans les provinces wallonnes et 27 dans le Brabant [20]. Ils sont désignés par 30.000 électeurs sur les 46.000 inscrits, le vote n’étant pas obligatoire. De fait, la période houleuse et surtout l’orangisme – la fidélité à l’ancien régime – poussent certains à l’abstention [21]. Le 10 novembre, 152 députés [22] se réunissent pour une première séance à Bruxelles dans l’ancien palais des États généraux, actuel Palais de la Nation. Au fil des travaux, les 200 élus s’impliquent plus fortement et même tiennent des débats âpres et acharnés [23]. On pourrait ajouter qu’ils pratiquent une transparence politique : en arrêtant son règlement intérieur, les congressistes ont décidé que, sauf demandes expresses, les votes sont émis à haute voix sur toutes les questions [24].
Lors des travaux du Congrès, c’est le projet de Constitution émanant de la Commission établie par le Gouvernement provisoire qui est discuté de préférence à d’autres : sur les 131 articles de la Constitution promulguée le 7 février 1831, 108 sont repris du projet de la Commission, soit textuellement, soit en les aménageant légèrement [25].
Un congrès national en 2020 ou 2021 ?
L’élection d’un congrès national en 2020 ou 2021 aurait beaucoup de sens pour appréhender d’une manière nouvelle la réforme de l’État, indépendamment du fait d’ailleurs que cette initiative pourrait contribuer à ce nouveau formatage de notre société que certains appellent de leurs vœux dans un monde post-Covid-19. Sur les réseaux sociaux n’évoque-t-on pas un reset de notre manière de vivre ensemble ? Davantage qu’une nouvelle échéance électorale que beaucoup pensent inéluctable, la préparation et la tenue d’un Congrès national – nous l’avons vu – sont porteuses d’un surcroît de légitimité et d’innovation.
À l’instar du Gouvernement provisoire de 1830, le Gouvernement Wilmes-Geens, provisoire lui aussi, pourrait préparer les élections d’un Congrès national de 200 membres. Pour ce faire, il pourrait, à défaut d’y avoir désigné d’emblée deux vice-premiers ministres PS et NVA, s’associer, comme dans le Conseil national (ou fédéral ?) de Sécurité, les ministres-présidents des entités fédérées. Il s’agirait de rédiger, sur des bases innovantes, une loi électorale permettant d’élire un Congrès national comme en 1830 et d’en déterminer les règles (protection des minorités, votes à majorité qualifiée, etc.). Le mode de scrutin devrait être aussi innovant que lorsque le jeune Jean-Baptiste Nothomb l’avait préparé en 1830. Pas plus qu’à l’époque, nous ne manquons de brillants et jeunes juristes… Ainsi, pourrait-on, par exemple, établir le droit vote à l’âge de 16 ans le jour de l’élection – les lycéennes et lycéens n’ont-ils pas montré dans la rue qu’ils se sentaient concernés par les affaires publiques ? -, de tous les résidents européens ou non européens en séjour légal dans le royaume depuis cinq ans. Il serait également possible de modifier les circonscriptions et de permettre, d’une manière ou d’une autre, un renouvellement et une mobilité plus grande des candidats, etc. La volonté d’innovation impose de lever les tabous… Tout cela peut-être largement débattu et mobiliser beaucoup d’intelligence collective et de créativité citoyenne.
Parallèlement, le gouvernement fédéral pourrait lui aussi mettre en place une Commission de la Constitution pour plancher de manière indépendante et libre sur des principes et un projet, préparer le terrain de la réforme comme a pu le faire dans les années 1950 le Centre Harmel [26].
Quinze jours après les élections, les 200 membres du Congrès national se réuniraient pour écrire la nouvelle Constitution de la Belgique – néo-fédérale, confédérale ou que sais-je encore ? Ils auraient six mois pour faire aboutir leur travail et l’obligation de le mener à bien. La démarche elle-même serait porteuse de transparence et d’un large débat public pour l’alimenter tout au long de son parcours.
L’avantage de la Constituante, c’est qu’elle peut renouveler les acteurs et être innovante. Elle permettra de déterminer également si les résidents de la Belgique veulent vivre ensemble sur cet espace et y développer des projets communs.
Certains diront que la crise du Covid-19 doit d’abord être résolue, ses impacts sanitaires, sociaux, économiques. Ils ont raison, c’est notre priorité à toutes et à tous. Les circonstances difficiles que nous subissons ne doivent cependant pas empêcher tout débat en profondeur, anticipation créatrice et réflexion solide sur l’avenir.
Lorsqu’en décembre 1943, le général US Dwight D. Eisenhower fut désigné à la tête du Quartier général suprême des forces expéditionnaires alliées (SHAEF) à Bushy Park (UK), de nombreuses opérations vitales étaient en cours sur tous les fronts : contre les nazis, contre les fascistes italiens et contre les militaristes japonais. Néanmoins, si Ike ne s’était pas attelé dès ce moment et avec toutes les forces qu’on lui avait confiées à préparer l’opération Overlord, le débarquement de Normandie n’aurait pas pu avoir lieu six mois plus tard avec le succès que l’on sait.
Si on ne veut rien changer dans le monde qui vient, on restera prisonnier du vieux monde… Si on veut le transformer, le questionnement sur l’opportunité du moment risque toujours de servir de prétexte à l’immobilisme.
Or, en dehors de cette possible transformation, nos scénarios sont inépuisables.
Philippe Destatte
@PhD2050
[1] Paul GERARD et Henk DHEEDENE, Geert Noels et Philippe Destatte : “Cette crise va accélérer la réforme de l’État”, dans le cadre des entretiens de Val Duchesse, Une solution pour la Belgique, dans L’Écho, 21 mars 2020, p. 12-13. – Deze crisis zal hertekening van België in stroomversnelling brengen, Philippe Destatte: ‘We moeten een nationaal congres verkiezen om de grondwet te herschrijven.’ in De Tijd, 21 maart 2020.
[2] Hugues DUMONT, Étudions l’avenir possible pour l’État belge, dans Le Vif, 14 novembre 2019, p. 29.
[3] Théodore JUSTE, Le Congrès national de Belgique (1830-1831), t. 1, p. XIII, Bruxelles, 1880.
[4]Le gouvernement provisoire, considérant qu’il importe de fixer l’état futur de la Belgique, arrête :
Art. 1. Les provinces de la Belgique, violemment détachées de la Hollande constitueront un Etat indépendant.
Art. 2. Le comité central s’occupera au plus tôt d’un projet de Constitution.
Art. 3. Un congrès national, où seront représentés tous les intérêts des provinces, sera convoqué. Il examinera le projet de Constitution, le modifiera en ce qu’il jugera convenable, et le rendra, comme Constitution définitive, exécutoire dans toutes la Belgique. Arrêté du gouvernement provisoire du 4 octobre 1830. Émile HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, 1830-1831, t. 4, Pièces justificatives, p. 10, Bruxelles, Adolphe Wahlen & Cie, 1844.
[5]La démarche même des révolutionnaires belges qui consiste à se choisir une assemblée constituante afin d’affermir et de légitimer un régime politique nouveau, implique en soi une relation significative, sinon intense, entretenue par ces révolutionnaires belges avec la configuration idéologique de la Révolution française. Philippe RAXHON, Mémoire de la Révolution française de 1789 et Congrès national belge (1830-1831), dans Revue belge d’Histoire contemporaine, t. XXVI, 1996, 1-2, p. 33-83, p. 36.
[6] Els WITTE, La construction de la Belgique, p. 92. selon Els Witte le mot renvoie à la Révolution brabançonne de 1790. – A noter qu’E. WITTE utilise le mot Constituante en néerlandais E. WITTE e.a., Nieuw Geschiedenis van België (1830-1905), p. 110, Tielt, Lannoo, 2005.
[7] Robert DEMOULIN, Le courant libéral à l’époque du Royaume des Pays-Bas et dans la Révolution de 1830, p. 37, dans Hervé HASQUIN et Adriaan VERHULST dir., Le Libéralisme en Belgique, Deux cents ans d’histoire, Bruxelles, Centre Hymans – Delta, 1989.
[14] Ces conditions étaient quelque peu plus élevées que sous le régime de Guillaume d’Orange… Els WITTE, Alain MEYNEN et Dirk LUYTEN, Histoire politique de la Belgique, De 1830 à nos jours, p. 19, Bruxelles, Samsa, 2017.
[15] On n’oubliera pas que les 44.069 électeurs inscrits, soit 38.429 censitaires et capacitaires n’atteignant pas le cens, ne représentent qu’1% des 4 millions d’habitants de 1830. René VAN SANTBERGEN dir., Le Parlement au fil de l’histoire, 1831-1981, p. 13, Bruxelles, Chambre des Représentants et Sénat, 1981. – Henri PIRENNE, Histoire de Belgique, Des origines à nos jours, t.3, p. 521, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1950. – Là aussi, comme aux élections communales, l’exigence des démocrates d’élargir le droit de vote n’est pas prise en compte. E. WITTE, Nouvelle histoire de Belgique (1828-1847), La construction de la Belgique, p. 68, Bruxelles, Le Cri, 2010. – Ce qui nous apparaît aujourd’hui scandaleux fut alors fait au nom de la liberté. Comme l’a écrit l’économiste et politologue Émile de Laveleye (1822-1892), si le peuple est assez peu éclairé pour écouter ceux qui lui promettent le bonheur par le despotisme militaire ou théocratique, alors accorder à tous le droit de voter, c’est creuser le tombeau de la liberté. p. n, dans la préface à Th. JUSTE, Le Congrès national…, 1880, p. n.
[16] Arrêté du gouvernement provisoire du 10 octobre 1830, Articles 10. É. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique…, t. 4, p. 11.
[17]Ibidem, Art. 11. – Th. JUSTE, Le Congrès national…, t.1, p. 62.
[19] Ces capacitaires ne seront pas maintenus dans la Constitution du 7 février 1831 qui ne réservera plus le droit de vote, on le sait, qu’aux seuls censitaires.
[20] Louis-Th. MAES & René VAN SANTBERGEN dir., Documents d’histoire de Belgique, t. 2, La Belgique contemporaine, De 1830 à nos jours, p. 8, Bruxelles, Ministère des Affaires étrangères, 1978.
[21] Frans VAN KALKEN, La Belgique contemporaine, p. 45, Paris, A. Collin, 1930. – Voir aussi Els WITTE, Le Royaume perdu, Les orangistes belges contre la Révolution (1828-1850), Bruxelles, Samsa, 2016.
[25] Xavier MABILLE, Histoire politique de la Belgique, Facteurs et acteurs de changement, p. 107, Bruxelles, CRISP, 1986.
[26] Mina AJZENBERG-KARNY et Lili ROCHETTE-RUSSE, Centre Harmel, dans Paul DELFORGE, Philippe DESTATTE et Micheline LIBON dir., Encyclopédie du Mouvement wallon, t. 1, p. 241-242, Charleroi, Institut Destrée, 2000.
L’État belge va encore muter, déclarait Hervé Hasquin le 13 octobre 2000. Et l’historien – alors également ministre-président de la Communauté française – d’estimer que, dans un délai sur lequel il ne voulait pas se prononcer, la Belgique ne sera plus un État fédéral, mais un État confédéral, ajoutant que : c’est du cousu main [1].
Le confédéralisme, je l’ai montré, est intrinsèquement lié à l’évolution institutionnelle de la Belgique, depuis ses origines, probablement au même titre que le fédéralisme. Le mentor de Hervé Hasquin en politique, le constitutionnaliste François Perin (1921-2013), l’avait évoqué dès 1969, à l’aube de la réforme de l’État. Lors d’une interpellation de Gaston Eyskens (1905-1988), le professeur liégeois avait observé que la philosophie du parti du Premier ministre CVP lui-même était davantage confédéraliste que fédéraliste [2]. Près de quarante ans plus tard et bien avant la réforme de 2014, deux jeunes chercheurs de la Faculté de Droit de l’Université de Liège, Marie Olivier et Michel Pâques, constataient, pour leur part, que le système belge était arrivé à mi-chemin entre l’État unitaire et la création d’États souverains. Par certains aspects, il emprunte déjà au confédéralisme [3], observaient-ils, tout en soulignant que certaines bases du fédéralisme faisaient encore défaut…
Le discours confédéral s’appuie sur un élément réel à la fois tactique et sociologique, notait le journaliste Christophe De Caevel en 2010 dans L’Écho. C’était l’époque où la N-VA venait d’inscrire le confédéralisme à son programme intitulé Nu durven veranderen (Oser changer maintenant) et alors que l’OpenVLD, le CD&V et le sp.a s’en faisaient les promoteurs, avec certes de fortes nuances entre eux [4]. De Caevel, qui est un des plus fins observateurs francophones de ce positionnement institutionnel flamand, qualifiait le discours confédéral de tactique parce que les partis traditionnels peuvent indiquer une volonté très ambitieuse de réforme de l’État au-delà d’une simple adaptation du fédéralisme, et aussi de sociologique, car, disait-il, les deux grandes communautés belges ne vivent pas ensemble, mais côte à côte, avec des références culturelles divergentes. Acter le discours confédéral aiderait, notait-il, à reconstruire les ponts entre communautés [5]. C’est ce que Didier Reynders avait tenté de faire en 2007 dans une interview au journal Le Monde, dans laquelle le président des libéraux francophones avait, disait-on, rompu un tabou. Le libéral liégeois avait simplement constaté la position politique flamande et prôné de la prendre sérieusement en compte : la logique à l’œuvre en Belgique est celle d’une confédération, avait dit Reynders. L’enjeu est donc d’apprendre à faire vivre ensemble des gens qui se meuvent déjà dans des univers différents. Et c’est cela qui me semble encore possible. Cette parole libre lui avait immédiatement valu le pilori en Wallonie et à Bruxelles [6]. En janvier 2008, Philippe Moureaux (1939-2018) s’essaya aussi à cet exercice en ouvrant la voie d’une négociation du confédéralisme à la flamande, pour autant, disait l’ancien ministre, que les francophones y conservent la solidarité nationale comme valeur ajoutée et qu’ils obtiennent la stabilisation du royaume de Belgique par un verrouillage institutionnel concrétisé par des lois spéciales désormais votées au 3/4 des suffrages [7]. Le socialiste bruxellois n’avait pas, lui non plus, été porté en triomphe dans sa communauté…
Si on dépasse ces ballons d’essai salutaires, un dialogue sérieux et fort entre les composantes institutionnelles de l’État belge reste essentiel. Néanmoins, ce qui pose problème dans les modèles prospectifs flamands, ce n’est pas l’accroissement de compétences renforçant les moyens d’action des entités fédérées, voire même la transformation de l’État vers un au-delà du fédéralisme : on sait depuis longtemps que le fédéralisme belge est de désintégration. Ce qui pose véritablement question, c’est l’évolution du discours flamand vers un modèle binaire renforcé, qui ne tient pas compte des mutations institutionnelles de ces cinquante dernières années. On pouvait penser que les changements constitutionnels allaient permettre d’abandonner une vision étriquée du paysage institutionnel ; on avait imaginé que ces transformations nous éloigneraient d’un face-à-face simpliste, parce que binaire et dichotomique ; on aurait aimé qu’évolue cet antagonisme passéiste qui ne parvient pas à dépasser le stade desdeux grandes communautés. Si on tend l’oreille, on observe d’ailleurs qu’un certain nombre de Wallons et de Bruxellois francophones n’y échappent pas non plus, ce qui nous paraît très regrettable.
2. Une autre pensée institutionnelle, polycentrique et équilibrée
Il existe en effet une autre manière de penser la réalité. Elle se fonde sur une tradition (con)fédéraliste wallonne qui, de Julien Delaite à Jules Destrée, de Georges Truffaut à Freddy Terwagne et François Perin a mis en avant le fait régional. Il existe sans aucun doute un fil conducteur qui relie quelques renardistes de la droite et de la gauche de l’échiquier politique, issus du MPW ou de ses sympathisants et cheminant au travers de la commission institutionnelle du Manifeste pour la culture wallonne en 1983, à la longue préparation du congrès des socialistes wallons tenu à Ans en février 1991 où Robert Collignon avait espéré voir triompher un modèle qu’il avait esquissé deux ans auparavant [8]. Portée par Jean-Maurice Dehousse sur ce plan régional, la réforme de l’État de 1993 a constitué une étape vers cette vision. Six ans plus tard, c’est l’intervention du politologue spécialiste de l’État fédéral en Belgique, Jacques Brassinne, au Congrès La Wallonie au futur de 1998 qui permet de renouer le fil [9]. Le vice-président du CRISP et de l’Institut Destrée observait que, calquées sur les quatre régions linguistiques, on peut envisager l’existence in abstracto de quatre entités fédérées nanties d’une large autonomie ayant des compétences à la fois dans les matières régionales et communautaires. Jacques Brassinne ne cachait évidemment pas les réticences potentielles flamandes envers ce modèle ni le fait que ce processus prendrait du temps : en renforçant leurs compétences, ces quatre entités pourraient se développer d’une manière autonome dans le cadre de la Belgique fédérale, soit en dehors de celle-ci[10].
En 2006 et 2007, l’Institut Destrée a mené un projet interne pour fonder une vision prospective institutionnelle. Il s’agissait de disposer d’un modèle clair, portant sur un horizon lointain, et constituant un atout stratégique indéniable pour tous ceux qui voudraient faire progresser les institutions de manière raisonnable et efficace.
Cette Belgique se présente comme un État fédéral composé de quatre Régions fédérées : la Flandre, la Wallonie, Bruxelles et la Région germanophone, OstBelgien. Elles seraient égales en droit et auraient un territoire définitivement fixé et reconnu. Elles disposeraient toutes des mêmes compétences et les exerceraient, respectivement, dans des matières identiques, uniquement sur leur propre territoire. Les frontières des quatre Régions seraient définitives et fixées sur la base actuelle, qui est celle qui a été fondée voici déjà plusieurs dizaines d’années. Les quatre Régions, chacune pour ce qui la concerne, seraient compétentes pour toutes les matières qui ne sont pas attribuées formellement à l’État fédéral par la Constitution. Afin que les Régions puissent pleinement assumer leurs responsabilités, elles seraient également responsables pour tout ce qui concerne les enseignements primaire, secondaire et supérieur, la recherche scientifique dans toutes ses composantes, ainsi que pour la culture et les matières personnalisables. Les quatre Régions fédérées assumeraient la pleine responsabilité de leurs actes politiques. La détermination des impôts fédéraux et des impôts régionaux serait établie de telle manière que toutes les entités puissent se financer par elles-mêmes sur le long terme. Le pouvoir fédéral exercerait ses compétences dans les matières suivantes : la cohésion économique, sociale et monétaire dans le cadre européen, la politique étrangère, la défense, la justice, la police fédérale, la sécurité sociale (solde de ce qui n’a pas été transféré par la réforme de 2011-2014), les pensions, la santé publique, la dette publique, l’octroi de la garantie de l’État, la fiscalité fédérale, la coordination dans le domaine de la recherche scientifique. Outre l’Exécutif, les institutions fédérales se composeraient d’une Chambre de cent-cinquante députés élus au suffrage universel dans quatre circonscriptions électorales régionales, proportionnellement à la population de chacune des quatre Régions, selon le système électoral fixé par la Chambre. Quant au Sénat, il deviendrait une véritable Chambre des Régions composée de soixante sénateurs élus par chacun des Parlements régionaux.
Un fédéralisme à 4 entités fédérées selon le projet Brassinne-Destatte (2007) – Infographie PhD2050
Les compétences du Sénat porteraient à la fois sur la prévention et le règlement des conflits d’intérêts entre les entités fédérées, sur des compétences conjointes avec la Chambre, notamment sur les lois à adopter à une majorité spéciale. Le Sénat disposerait d’un droit d’évocation dans les autres matières. Le vote des propositions et projets de loi y serait conditionné à l’obtention de la majorité absolue dans chaque groupe territorial. Afin de favoriser une entente durable entre les Régions fédérées, il sera nécessaire d’identifier et de renforcer les mécanismes de coopération entre l’État fédéral et les Régions fédérées, mais également entre les quatre Régions fédérées elles-mêmes. Les mécanismes de coopération porteront aussi sur les domaines économique, social et fiscal. Chaque Région s’engagerait, conformément à la Constitution, à respecter les Droits de l’Être humain, les libertés fondamentales et les droits des minorités, conformément à la Convention-Cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales. Le projet volontariste d’un fédéralisme raisonnable et équilibré, fondé sur quatre Régions égales en droit est simple, pédagogique et facilement appropriable par les citoyennes et les citoyens, ce qui constitue une véritable innovation. Sa vertu profonde réside dans le fait qu’il permettrait de faire échapper la Belgique à la logique néfaste de l’affrontement entre les clans linguistiques, de rompre le face-à-face destructeur en recherchant un nouvel équilibre. Le fédéralisme à quatre Régions égales en compétences permettrait de donner à Bruxelles une vraie chance de trouver une cohésion territoriale répondant aux multiples enjeux que cette Région doit relever : capitale européenne, métropole multiculturelle, désindustrialisation, paupérisation urbaine, etc. La Région germanophone pourrait émerger sur le plan des compétences régionales et contribuer à l’équilibre de l’ensemble. La Flandre y trouverait l’occasion d’un redéploiement territorial sur la métropole anversoise et d’un affaiblissement des démons du nationalisme belliqueux, opposé au nationalisme amoureux, pour reprendre la typologie de l’historien Pierre Nora. Quant à la Wallonie, elle pourrait sortir l’enseignement, la recherche, la culture, l’éducation permanente de leur ghetto moral et financier : à l’heure de la société de la connaissance, elle retisserait enfin ces compétences essentielles avec celles de l’aménagement du territoire, de l’action sociale et du développement des entreprises [11].
En adoptant ce modèle, il serait assurément possible de stabiliser l’État belge au travers d’un fédéralisme très avancé qui peut apparaître comme une évolution légitime d’un système qui en a mis progressivement en place les balises. En tout cas, de Johan Vande Lanotte à Didier Reynders, ou de Karl-Heinz Lambertz à André Antoine, nombreux sont ceux qui ont pu le valoriser depuis divers bancs [12].
3. Une base de discussion confédérale entre la Flandre, Bruxelles, l’OstBelgien et la Wallonie
Après avoir précédemment décrit le modèle de la confédération belge selon la N-VA, telle qu’il s’est développé depuis octobre 2013 avec l’attribution de compétences résiduelles aux communautés flamande et wallonne et le maintien de deux régions spécifiques pour Bruxelles et la Communauté germanophone, il nous paraît utile, sinon indispensable, de rapprocher les formules pour en débattre. En comparant les deux figures que constituent, d’une part, le fédéralisme à 4 entités fédérées et, d’autre part, la confédération belge selon la N-VA, chacun mesure l’ampleur des différences… Aucun des deux ne survivra à une discussion institutionnelle. Un troisième modèle est à construire, de nature à satisfaire les différentes parties et à lui donner suffisamment de pertinence et de solidité pour en assurer la pérennité et la durabilité. Politiquement, ce passage vers un modèle de synthèse, encore à inventer, pose au moins deux problèmes majeurs. Le premier est celui de la légitimité : sur quelle base refonder pour les citoyens un cadre tellement différent du pacte de 1831, mais qui, en même temps, puisse faire sens et s’imposer sans être contesté ? Le second problème est celui de la robustesse de la nouvelle union entre les entités qui s’associeront dans le nouveau modèle fédéral avancé ou confédéral – j’ai déjà dit que les mots importaient peu en cette matière.
Pour donner une légitimité suffisante au nouveau modèle, il semble que la solution préconisée par le professeur de droit constitutionnel Hugues Dumont puisse posséder toute l’ampleur nécessaire : il s’agirait d’élire dans la circonscription fédérale les membres d’un Congrès national investi d’un pouvoir constituant. Ainsi, les Chambres rendues constituantes par l’adoption d’une déclaration de révision pourraient-elles fixer une procédure exceptionnelle pour que ce Congrès national (fédéral ou confédéral) refonde l’État, ou en tout cas son cadre, sur de nouvelles bases [13]. Cependant, et parallèlement, il s’agit de rendre le modèle robuste et pérenne par un pacte fédéral ou un traité confédéral conclu entre les différentes entités. Si le modèle approuvé par la constituante est celui que nous préconisons, les quatre entités auront dès lors à négocier entre elles pour finaliser ce document refondateur. Chacune ensuite rédigera sa propre charte ou constitution.
Sur la table du Congrès national et des entités qui refondent le pacte, parmi d’autres, se trouveront les modèles N-VA de confédéralisme à 2+2 et celui de fédéralisme à 4. Un confédéralisme à 4 peut être envisagé qui rejoindrait les points de vue et serait mis en débat. Un Parlement belge quadritaire jouerait à la fois le rôle de Chambre confédérale et de Sénat des Régions. Les députés confédéraux, au nombre de 60, seraient élus au scrutin secret au sein des parlements de Bruxelles, de Flandre, d’OstBelgien et de Wallonie qui en désigneraient chacun quinze. Aucune loi confédérale ne serait adoptée si elle ne rassemble pas la majorité dans chacun des groupes régionaux. Le Gouvernement confédéral serait composé de huit ministres désignés par les quatre régions. Cette désignation se ferait par le gouvernement de chaque état confédéré qui pourrait désigner quelqu’un en son sein ou choisir en-dehors une ou des personnalités qualifiées (un ancien commissaire européen, un ancien gouverneur, etc.), qui auraient à la fois vocation et capacité à représenter leur région confédérée, mais aussi à coopérer avec leurs pairs au niveau confédéral. Les ministres représenteraient clairement leur entité confédérée. La formation du gouvernement confédéral se ferait obligatoirement dans la foulée des gouvernements des entités confédérées dans les deux mois qui suivent les élections régionales. Seraient ainsi résolues ces longues crises post-électorales qui décrédibilisent le monde politique fédéral.
Un confédéralisme à quatre (2020-2030) – Infographie PhD2050
Les compétences du niveau confédéral porteraient sur la défense et la politique étrangère de la confédération, la fiscalité confédérale et la dette, la cohésion économique et sociale, la sécurité sociale et les pensions, la Cour de Cassation, la Cour constitutionnelle, la TVA et les accises. L’ensemble des autres compétences, dites résiduelles, y compris l’impôt sur les personnes physiques seraient attribuées aux entités confédérées.
L’organisation et le fonctionnement des parlements et gouvernements de Bruxelles, Flandre, OstBelgien et Wallonie seraient précisés dans le cadre de leur autonomie constitutive et inscrits dans leur charte ou constitution respective.
Un Conseil de Concertation permanente serait mis en place et réunirait mensuellement les Premiers ministres de Bruxelles, Flandre, OstBelgien et Wallonie. Un Conseil de même type se réunirait tous les deux mois entre les ministres des entités confédérées en charge des quinze enjeux d’avenir identifiés dans la déclaration de politique confédérale.
Conclusion : osons le confédéralisme, mais à quatre !
C’est l’ancien professeur de lettres et d’histoire, Élie Baussart (1887-1965), enseignant au Collège des Jésuites à Charleroi, qui écrivait dès 1928 que la Flandre et la Wallonie ne sont pas faites pour la Belgique ; la Belgique est faite pour la Flandre et la Wallonie. Comme l’État est fait pour le citoyen et non le citoyen pour l’État [14]. Ce qui semblait osé à ce moment relève aujourd’hui du simple bon sens. Quatre-vingt-dix ans plus tard, nous ajouterons Bruxelles et l’OstBelgien à la Flandre et à la Wallonie, car le fédéralisme, qu’on l’aime ou non, est passé par là. Et sa réalité a prévalu.
Au moment du Pacte d’Egmont, en 1978, le député CVP Jan Verroken évoquait les mécanismes de développement institutionnel inscrits dans l’accord, refusant de s’engager dans les étiquettes pour dire si l’évolution portait la Belgique vers le fédéralisme ou le confédéralisme, considérant que l’on pouvait se diriger vers une sorte de royaume de républiques unies (een soort koninkrijk van verenigde republieken) [15]. Ainsi, faut-il aujourd’hui cesser cette forme de postulat aussi futile qu’inutile chez certains francophones selon lesquels le confédéralisme ne serait qu’une dérive inéluctable vers la séparation, toute phase confédérale n’étant qu’une transition vers la dissolution de l’État[16]. En effet, nous pourrions avantageusement considérer que le confédéralisme constitue le fameux point d’équilibre recherché dans les sept vagues précédentes de réformes de l’État. Nous savons également que toute absence d’accord au niveau fédéral aboutirait à un confédéralisme de fait. Ne vaut-il donc pas mieux se mettre autour d’une table et construire ce que Bruxellois, Flamands, Germanophones et Wallons peuvent encore concevoir ensemble avec toute leur expérience de l’innovation dans l’ingénierie institutionnelle ? François Perin rappelait avec raison que, à la veille des émeutes de 1830 – et même pourrait-on ajouter, juste avant la fin de l’intervention hollandaise, le 26 septembre -, aucun n’imaginait l’indépendance de la Belgique. La suite de l’analyse du professeur est bien connue : raisonnablement, en attendant une plus grande unité européenne, sans doute à l’aube du troisième millénaire, le démembrement progressif et négocié de l’État belge est plus vraisemblable et aussi plus rentable pour tous qu’une brusque implosion provoquée par une crise sans issue.Fédéralisme ou confédéralisme ? Toutes les solutions transitoires et relativement instables seront très compliquées, fruits de compromis plus ou moins boiteux [17].
Ce choix du confédéralisme ne sera évidemment pas simple. Il impliquera des mécanismes de cohésion et de responsabilisation. Qui en douterait ? Et, si nous avons pu observer qu’au fil du temps, tous les grands partis démocratiques flamands se ralliaient à l’idée de confédéralisme, nous avons vu également que tous, y compris la N-VA [18], souhaitaient que ces mécanismes persistent. Comme l’affirmait déjà clairement le député Étienne Knoops lors de la discussion de la réforme de 1980 : dans un État, même fédéral ou confédéral, la règle de la solidarité doit être appliquée. Si tel n’était pas le cas, il n’y aurait plus d’État. Le libéral disait avoir frémi en entendant en commission certains membres vouloir appliquer, sans la nommer, ce que l’on appelle au niveau international la loi du juste retour. Si les régions et les communautés n’étaient financées que sur cette base du juste retour, il n’y aurait plus demain d’État belge sous quelque forme que ce soit[19].
Si ce principe est partagé et respecté à Anvers, Bruxelles, Eupen et Namur, n’hésitons pas à écrire, comme le faisait Christophe De Caevel en 2007 Osons le confédéralisme… [20] Mais seulement si nous le mettons en place et l’assumons à quatre [21].
Et puis, s’il échoue, il sera toujours temps d’envisager d’autres formules. Notre créativité et notre capacité d’innovation ne seront certainement pas prises en défaut…
[1]Hasquin : “On va vers le confédéralisme”, dans L’Écho, 13 octobre 2000.
[2] Interpellation de François Perin, dans Annales parlementaires, Chambre, 13 mai 1969 p. 5 et 6.
[3]Par exemple, en partageant la compétence des relations internationales (art. 167) et en permettant aux communautés, aux régions et à l’État de conclure entre eux des accords de coopération qui ressemblent à des traités entre sujets de droit international (article 92bis de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980). Michel PÂQUES et Marie OLIVIER, La Belgique institutionnelle, Quelques points de repère, dans Benoît BAYENET, Henri CAPRON et Philippe LIEGEOIS éds., L’Espace Wallonie-Bruxelles, Voyage au bout de la Belgique, p. 60, Bruxelles, De Boeck, 2007. – La Belgique a construit son modèle institutionnel fédératif non par une dynamique de centralisation, mais de décentralisation. De surcroît, les partis politiques y jouent un rôle prédominant et les éléments confédéraux qui prévalent depuis l’origine de la réforme. Rolf FALTER, Belgium’s Peculiar Way to Federalism, in Kas DEPREZ and Louis VOS, Nationalism in Belgium, Shifting Identities,1780-1995, p. 193, London, MacMillan, 1998.
[4]Confédéraliser, version N-VA : qu’est-ce qui reste ? dans L’Echo, 25 mai 2010. – Du confédéralisme “soft” à la vitrine de l’Open VLD, dans L’Echo, 24 mai 2010.
[5] Chr. DE CAEVEL, Le diable confédéral avance masqué, dans L’Echo, 29 mai 2010.
[6] Chr. DE CAEVEL, Tabou confédéral, Edito, dans L’Echo, 13 novembre 2007. – Jean-Pierre STROOBANTS, En Belgique, “la logique est celle d’une confédération”, Didier Reynders, libéral francophone, exige un “signal clair” des Flamands sur leur volonté de maintenir un État fédéral, dans Le Monde, 10 novembre 2007.
[8] Robert COLLIGNON, La Communauté française ou le paradoxe de la réforme de l’État, dans A l’enseigne de la Belgique nouvelle, Revue de l’ULB, Bruxelles, 1989, 3-4, p. 179-181.
[9] Jacques BRASSINNE, La Wallonie et la réforme de l’Etat, dans La Wallonie au futur, Sortir du XXème siècle, évaluation, innovation, prospective, p. 262-263, Charleroi, Institut Destrée, 1999.
[13] Hugues DUMONT, Étudions l’avenir possible pour l’État belge, dans Le Vif, 14 novembre 2019, p. 29. A noter que, à l’heure des grandes manipulations occultes et numériques de l’opinion, je ne suis pas Hugues Dumont sur son éventuelle ratification par un référendum.
[14] Elie BAUSSART, 1930 verra-t-il la faillite de 1830 ?, dans La Terre wallonne, Octobre 1928, p. 24.
[15]Ik erkende zelfs dat er in dit Egmontplan ingebouwde mechanismen zitten die de geschetste strucruren automatisch tôt verdere ontwikke-lingen zullen laten komen.Ik wil mij thans verder evenmin bezondigen aan etiquettevitterij, over de vraag of wij hiermee al dan niet naar een federalisme of een confederalisme evolueren. Men zou evengoed kunnen stellen dat wij met dit land naar een soort koninkrijk van verenigde republieken evolueren. Intervention de Jan Verroken, Annales parlementaires, Chambre, 2 mars 1978, p. 1312.
[16] Christian FRANCK e.a., Choisir l’avenir, La Belgique en 1999, p. 27, Bruxelles, Luc Pire, 1999.
[17] François PERIN, Histoire d’une nation introuvable, p. 296, Bruxelles, Legrain, 1988.
[18]Le confédéralisme belge selon la Nieuwe-Vlaamse Alliantie, dans L’Écho, 19 janvier 2019.
[19] Intervention d’Étienne Knoops, dans Annales parlementaires, Chambre, 31 juillet 1980, p. 2814.
[20] Christophe DE CAEVEL, Osons le confédéralisme, dans L’Écho, 6 octobre 2007. – Son éditorial du 10 juin 2008 y faisait référence : Un an après, seuls les séparatistes ont le sourire, écrit après les menaces de la nouvelle présidente du CD&V Marianne Thyssen, de mettre en cause la solidarité interpersonnelle à défaut d’une profonde réforme de l’État.
[21] Olivier MOUTON, Le confédéralisme à quatre pour débloquer la Belgique, dans Le Vif, 10 juillet 2014.
1. Vers un Front flamand pour revendiquer le confédéralisme…
L’agitation du confédéralisme comme spectre institutionnel semblait avoir atteint son firmament lors des débats qui accompagnèrent le vote de la réforme de 1993. Si certains avaient peut-être prêché le faux à cette occasion, le vrai ne s’était pas encore fait connaître et n’allait pas tarder à se montrer. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer ” au sud de la Belgique “, la revendication confédéraliste ne renaît pas dans les rangs des nationalistes. Le 10 juillet 1994, dans un discours prononcé à Renaix, le ministre-président flamand, le CVP Luc Vanden Brande, en appelle, en effet, au développement d’une structure confédérale en Belgique. Il reçoit une réponse cinglante du ministre-président wallon Robert Collignon qui annule sa participation aux cérémonies officielles de la fête nationale flamande et, mettant en cause les compétences en droit constitutionnel de son homologue flamand, lui rappelle que la confédération entraîne la séparation[1]. Deux ans plus tard, au même moment de la fête de la Communauté flamande, les positions sur le confédéralisme adoptées par les socialistes Louis Tobback et Norbert de Batselier émeuvent à nouveau les Wallons et les Bruxellois francophones. Dans la note qu’il a rédigée pour la circonstance, de Batselier, alors président du Parlement flamand, conçoit une union confédérale d’États (Statenbond), cogestion à deux d’une Belgique qui maintient en son sein les compétences de la Justice, de la Politique étrangère et de la Défense comme matières confédérales. Cette position provoque une intervention courroucée du député Didier Reynders à la Chambre, le 16 juillet 1996 [2]. Évidemment, du côté de la Volksunie (VU), où il existe une véritable continuité de revendication, on se réjouit ; Bert Anciaux qui a été réélu à sa présidence en janvier 1996 porte l’idée de l’édification d’une confédération belge [3],. En juillet 1996, le député VU Karel Van Hoorebeke insiste sur la nécessité pour la Wallonie d’échanger avec la Flandre sur cette évolution au risque de rendre inévitable la scission de la Belgique [4]. En avril 1999, c’est la présidente du groupe VU à la Chambre, Annemie Van de Casteele, qui relaie la position de son parti qui, dit-elle, va au-delà des résolutions du Parlement flamand du 3 mars 1999 [5] ou des priorités du CVP. La Volksunie veut parvenir à un système confédéral dans lequel les États fédérés sont compétents pour toutes les questions pour lesquelles ils souhaitent l’être et qui décideront ensuite par consensus des initiatives qu’ils veulent prendre ensemble. Pour Bruxelles, il s’agit, annonce Annemie Van de Casteele, que la région soit gouvernée par les deux communautés et que le problème de la représentation flamande à Bruxelles soit réglé [6]. Au moment de l’éclatement de la Volksunie en 2000, Van de Casteele est, avec Bert Anciaux et son groupe ID21, parmi les fondateurs de SPIRIT dont elle devient présidente, avant de rejoindre l’Open VLD. En 2001, Geert Bourgeois, représentant de l’aile conservatrice, fonde la Nieuw-Vlaamse Alliancie (N-VA). Se posant en héritière directe de la Volksunie, la N-VA dépasse le confédéralisme et revendique la séparation de la Belgique, ainsi que l’indépendance de la Flandre. Toutefois, en cette année 2001 où le paysage politique flamand se recompose, la surprise vient des sociaux-chrétiens. Lors de son congrès de Courtrai, fin septembre, le vieux parti de Gaston Eyskens, Léo Tindemans, Wilfried Martens et Jean-Luc Dehaene entame sa rénovation sous le nom de Christen, Democratisch en Vlaams (CD&V) à l’initiative de son nouveau président Stefaan De Clerck. Sous l’influence des CVP-Jongeren et malgré les réticences de l’exécutif du parti, le congrès adopte un nouveau programme institutionnel prônant un confédéralisme à deux, réclamant le transfert à la Flandre et à la Wallonie des soins de santé, de la politique familiale ainsi que de la politique de l’emploi [7].
Chez les libéraux flamands, ce sont, semble-t-il, également les jeunes militants qui, dans la Déclaration du 17 novembre 2002, ont poussé l’Open VLD à inscrire le confédéralisme dans son programme institutionnel [8]. Le président du parti, Karel De Gucht avait néanmoins annoncé sur la chaîne VTM quelques jours auparavant, que la Belgique est, à terme, condamnée à disparaître, à partir en fumée et que, en attendant, elle n’apporte aucune valeur ajoutée à la Flandre [9]. Le 12 novembre, il se prononce en faveur du transfert des allocations familiales, de l’emploi, de la politique des handicapés et des personnes âgées, ainsi que de l’impôt des personnes physiques, celui des sociétés et de la gestion de la SNCB vers les communautés et les régions [10].
En prévision des prochaines élections fédérales, le président du CD&V, Stefaan De Clerck, appelle en mars 2003 à une révision de la Constitution. Son parti veut une réforme radicale qui débouche directement sur la création d’un État confédéral. Il réclame également que l’article 35 de la Constitution soit soumis à révision, de telle sorte que la Wallonie et la Flandre puissent décider quelles compétences – appelées dès lors “résiduelles” – doivent encore revenir à l’État fédéral. Comme chacun sait, cet article dispose que l’autorité fédérale n’a de compétences que dans les matières que lui attribue formellement la Constitution (…), tandis que les Communautés et Régions, chacune pour ce qui les concerne, sont compétentes pour les autres matières (…). Les sociaux-chrétiens flamands souhaitent supprimer les Régions et Communautés pour les remplacer par des “entités fédérées”, une Région capitale bruxelloise et une Communauté germanophone autonome [11].
Après ses défaites successives aux élections législatives de 1999 et de 2003, le CD&V, alors dans l’opposition, se choisit un nouveau président en la personne de son chef de groupe à la Chambre, Yves Leterme [12]. D’emblée, le nouveau président décide de s’adjoindre la N-VA afin de renforcer l’identité flamande de son parti et d’appuyer sa volonté de confédéralisme.
Quant à la N-VA, elle attend son heure. Elle va bientôt sonner…
2. La N-VA entre en lice
En novembre 2005, dans son Manifeste pour une Flandre indépendante dans l’Europe unie, le Groupe de réflexion flamand In de Warande propose une formule de confédération en vue d’émanciper la Flandre du poids d’une économie wallonne présentée en chute libre. Bruxelles serait sous la dépendance de deux États, la Wallonie et la Flandre, en attendant le renforcement de son rôle de capitale de l’Europe [13]. Comme l’indique l’ancien député AGALEV Luc Barbé, les propositions contenues dans ce texte ont produit un effet de résonance pendant plusieurs années, provoquant des inquiétudes toujours plus fortes sur le recul de la prospérité en Flandre [14].
En mars 2007, le président du CD&V Jo Vandeurzen appelle lui aussi à une nouvelle et profonde réforme de la Constitution. Avec l’appui de son allié N-VA présidé par Bart De Wever, il annonce avoir mis la dernière main à une proposition de révision de la Constitution traduisant leur volonté commune de transformer la Belgique en un État confédéral, dont les centres de gravité seraient la Flandre et la Wallonie. Bruxelles et la Communauté germanophone ne constitueraient pas des entités fédérées à part entière, mais recevraient un statut spécifique. Bruxelles resterait compétente pour les matières locales et verrait son rôle de capitale étendu, mais la Flandre et la Wallonie seraient également compétentes pour elle. Pour ce faire, le CD&V propose de réécrire les trois premiers articles de la Constitution [15]. L’alliance du CD&V avec la N-VA semble porter ses fruits. Aux élections fédérales du 10 juin 2007, le cartel CD&V/N-VA obtient près de 30% des voix à la Chambre.
Analysant le discours politique flamand en août 2007, le constitutionnaliste bruxellois Hugues Dumont note qu’en compilant les déclarations des partis flamands et en lisant entre les lignes lorsqu’ils parlent de confédéralisme, on peut décrypter ainsi leurs revendications :
– un État où les compétences non expressément attribuées (dites «résiduelles») reviennent aux Communautés et aux Régions, ce qui implique de réécrire complètement la Constitution belge ;
– un État où l’autonomie fiscale des entités fédérées est poussée jusqu’à son maximum, avec ce que cela entraîne comme conséquences de concurrence entre régions à ce niveau. Autonomie fiscale qui s’accompagne bien sûr de transferts de pans entiers de la sécurité sociale vers ces mêmes régions ;
– une réduction significative de l’autonomie de Bruxelles et de la Communauté germanophone (ce que l’on sait moins). Les inspirateurs du projet reprennent au confédéralisme l’idée de deux grands blocs autonomes, un wallon et un flamand, niant ainsi les spécificités bruxelloises et germanophones. La capitale serait appelée à être «cogérée» par les deux Régions, mais surtout pas par elle-même ;
– un État fédéral réduit à sa plus simple expression, puisque même des matières comme la justice ou les relations internationales lui échapperaient désormais. Tout au plus gérerait-il encore des compétences comme la police, la défense et les pensions. Mais guère plus. En fait, il serait plus dépouillé que n’importe lequel des gouvernements centraux qui existent à l’heure actuelle. Ce serait l’État fédéral le plus faible de la planète, une sorte de coquille vide [16].
Peu après avoir fait chuter le deuxième gouvernement d’Yves Leterme sur la question institutionnelle [17], Alexander De Croo, se rallie en mai 2010 à l’idée de confédéralisme. Le président de l’Open VLD souligne néanmoins qu’à ses yeux la réforme de l’État n’est pas une fin en soi, mais constitue une condition préalable pour relancer l’économie, payer les pensions, relever le taux d’emploi et rétablir d’ici 2015 l’équilibre des finances publiques. De Croo et ses collègues de l’Open VLD affirment rejeter le séparatisme et l’indépendance de la Flandre, marquant leur attachement au dialogue entre communautés. Pour Alexander De Croo, le confédéralisme est l’étape ultime de la transformation de la Belgique, le centre de gravité se situant au niveau des entités fédérées qui auraient négocié entre elles les compétences que le pouvoir fédéral continuera à exercer après activation de l’article 35 de la Constitution [18].
Le journaliste Christophe De Caevel décode alors la position des partis traditionnels flamands en campagne en observant, d’une part, que la référence au confédéralisme leur permet d’indiquer à la fois leur volonté d’une très ambitieuse réforme de l’État allant bien au-delà que des ajustements au fédéralisme et de marquer leur nette différence avec les partis séparatistes. D’autre part, le journaliste de L’Écho relève que les deux grandes communautés ne vivent pas ensemble, mais côte à côte, avec des références culturelles, des mentalités, une actualité différentes. Comme dans une confédération… Pour de Caevel, le discours confédéral s’appuie aussi donc sur un élément réel. L’acter, au lieu de perpétuer une fiction unitaire, aiderait peut-être à mieux appréhender certaines revendications flamandes (ce qui ne veut pas dire les accepter). Et, dans le même temps, à reconstruire les ponts entre les Communautés, à tonifier les références culturelles communes qui subsistent[19].
Comme le rappelle en janvier 2013 le député fédéral N-VA Ben Weyts, par ailleurs politologue à l’Université de Gand, dire que le confédéralisme désigne la collaboration entre deux États indépendants, c’est en donner une définition académique. En Belgique, il existerait une autre définition selon laquelle le confédéralisme est une autonomie poussée des entités fédérées, de telle sorte qu’elles exercent leurs compétences au plus près des gens. Quant à la politique étrangère et à la défense, elles seraient mieux exercées au niveau fédéral [20]. Ainsi, Jan Velaers, professeur de droit constitutionnel à l’Université d’Anvers, peut-il constater en 2013 que quatre partis politiques flamands – le CD&V, l’Open VLD, la liste Dedecker et la N-VA – représentant 66%, soit les deux tiers de l’électorat flamand, prônent, du moins officiellement, le confédéralisme [21]. C’est en effet après la chute de Leterme II, en avril 2010, que le leader de la N-VA Bart De Wever a mis en sourdine le discours indépendantiste pour camper sur la ligne confédéraliste [22]. Il l’a fait sans le CD&V puisque depuis le congrès de la N-VA du 21 septembre 2008, le parti fondé en 2001 ne soutient plus le gouvernement fédéral et a donc fait exploser le cartel flamand.
Après avoir d’abord défendu un programme institutionnel assez rudimentaire et approximatif, la N-VA va solidement définir, en vue des élections de 2014, ce qu’elle entend réellement par confédéralisme, en s’appuyant notamment sur les compétences de professeurs de droit public, en particulier Hendrik Vuye, alors en charge des questions institutionnelles au sein du parti.
3. Un projet confédéral substantiel
Ainsi, lors d’une conférence de presse le 30 octobre 2013, la N-VA présente-t-elle par un document de 76 pages son modèle confédéral : Verandering voor Vorruitgang (Le changement pour le progrès) [23], thème du congrès présidé par Ben Weyts qui doit se tenir début 2014. Dans ce projet de réforme de l’État belge, la Confédération serait compétente pour la Défense, les Affaires étrangères, les Finances, les conditions d’octroi de la nationalité, l’asile, la Cour de cassation et la Cour constitutionnelle, ainsi que la lutte contre la grande criminalité. Avec un budget de l’ordre de 28 milliards d’euros, collectés par la TVA et les accises qu’elle continuerait à percevoir, ainsi que si nécessaire des dotations venant des entités confédérées, la Confédération verserait la contribution belge au budget européen et prendrait en charge la réduction de la dette publique belge.
La confédération belge selon la N-VA Infographie PhD2050
Le gouvernement confédéral, paritaire, serait composé de six ministres désignés par la Flandre et la Wallonie. Les 50 députés confédéraux seraient choisis paritairement au sein des parlements flamand et wallon, avec une représentation garantie des Bruxellois et des germanophones. Les Bruxellois qui optent pour le régime fiscal et social néerlandophone contribueraient à élire le Parlement flamand ; ceux qui choisissent le régime francophone voteraient pour le Parlement wallon. La monarchie deviendrait strictement protocolaire. La Flandre et la Wallonie recevraient toutes les compétences résiduelles, y compris la perception de l’Impôt sur les Personnes physiques (IPP), sauf celles qui sont spécifiquement confiées à la Confédération. Bruxelles aurait la maîtrise de sa politique économique, y compris l’impôt des sociétés et les aides à l’emploi, en plus des actuelles compétences en logement, environnement, aménagement du territoire, etc. Ses habitants seraient toutefois rattachés à l’un des deux systèmes de sécurité sociale. Les communes bruxelloises seraient fusionnées et leurs compétences transférées au gouvernement régional, de même en ce qui concerne les CPAS et les zones de police. La Région pourrait lever des additionnels à l’IPP et au précompte immobilier. Elle serait gérée par un gouvernement paritaire, responsable devant un parlement de 70 députés, parmi lesquels une représentation garantie de 15 néerlandophones. La solidarité entre les différentes entités ne disparaît pas. Elle est organisée de manière permanente en mobilisant les moyens confédéraux, notamment la TVA, pour les entités où le revenu fiscal par habitant n’atteint pas 95% de la moyenne nationale [24]. Elle se veut chiffrable, transparente et responsabilisante. Un Conseil de Concertation permanente belge est composé des ministres-présidents de la communauté flamande, de la communauté wallonne et des régions bruxelloise et germanophone ou réunit les ministres compétents des différents domaines quand les besoins l’imposent. Au congrès de la N-VA, tenu à Anvers en janvier et février 2014, le confédéralisme est ainsi réaffirmé. Pour Bart De Wever, il signifie d’abord que la souveraineté descend du niveau fédéral vers les entités fédérées [25]. Interrogé à propos de ce modèle, le professeur de Sciences politiques à la KULeuven Bart Maddens estime qu’il s’agit du projet le plus détaillé qu’il lui ait été donné de voir sur l’avenir de la Belgique et qui se rapproche fortement d’un pur modèle confédéral au travers de trois innovations : d’abord, la suppression de la Constitution belge au profit d’un traité constitutionnel entre les entités fédérées, ensuite, la disparition des élections fédérales, seuls les parlements régionaux étant élus directement, enfin, la scission pure et simple de la sécurité sociale [26].
En attendant de conclure : un État fédéral sur un champ de ruines
Dans la postface de l’ouvrage de l’historien Frank Seberechts, Onvoltooid Vlaanderen, Van Taalstrijd tot Natievorming (La Flandre inachevée, Du combat linguistique à l’édification d’une nation), Bart De Wever observait en mai 2017 que sa stratégie s’inscrivait dans le long terme, comportait de nombreux risques et n’avait pas d’issue certaine. Néanmoins, affirmait le leader de la N-VA, cette stratégie lui apparaissait la plus réaliste pour faire advenir un nouveau paradigme en Flandre et en Belgique [27].
Comme l’écrivait l’éditorialiste Alain Narinx au lendemain des élections régionales, fédérales et européennes du 26 mai 2019, ces élections législatives laissent l’État fédéral sur un champ de ruines [28]. Si la N-VA perd 8 sièges, elle en conserve 25, se maintenant comme premier parti de Belgique. Plus inquiétant est le résultat du parti indépendantiste et fascisant flamand, le Vlaams Belang qui renoue avec son score des années 1990 et qui, progressant de 15 sièges, en atteint 18. Le CD&V et l’Open VLD obtiennent chacun 12 sièges, en en perdant respectivement 6 et 2. Les socialistes flamands du SPa voient leur représentation encore réduite passant de 13 à 9 sièges, faisant à peine mieux que Groen (8+2). Au Parlement flamand, le Vlaams Belang rassemble désormais 23 députés sur 124 élus, contre 35 à la N-VA et respectivement 19 et 16 aux sociaux-chrétiens et aux libéraux. On le voit, avec 58 sièges sur 124, le scénario indépendantiste est à portée de main. Quant au confédéralisme, il est sans nul doute à l’ordre du jour.
Quelle conclusion tirer de cette évolution et de cette situation présente ? Nous la tenterons dans un prochain papier. Assurément, le projet de confédéralisme de la N-VA n’est pas notre modèle. En Wallonie, nous sommes de plus en plus nombreux à penser en termes de réforme institutionnelle sur base de quatre régions et non de deux communautés tutélaires. Nombreux sont ceux aussi qui à Bruxelles et en OstBelgien réfléchissent sur cette base.
Faut-il dire que nous n’avons rien en commun avec la N-VA ? Je ne le crois pas. Nous avons probablement le même désir de transformer l’État pour qu’il atteigne un nouvel équilibre et soit plus pertinent, plus efficient, plus démocratique. Cela implique évidemment de concevoir des passerelles entre les différents projets. C’est à cela que nous nous attacherons dans notre prochain et dernier papier.
[1]Van den Brande veut un État confédéral, Collignon refuse l’invitation flamande, dans L’Écho, 12 juillet 1994.
[2] Intervention de Didier Reynders, Annales parlementaires, Chambre, 16 juillet 1996, p. 3120.
[3] Serge GOVAERT, La Volksunie. Du déclin à la disparition (1993-2001), dans Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1748 , Bruxelles, 2002/3, p. 5-44.
[4]Wanneer Wallonië niet bereid is over het invullen van een goed confederalisme van gedachten te wisselen, is de definitieve splitsing van België onvermijdelijk. Dit is thans niet onze doelstelling. Tot onze Waalse collega’s zeg ik dat dit niet hoeft te gebeuren op voorwaarde dat het confederalisme waarvoor de Volksunie staat ook op correcte wijze wordt ingevuld. Daaromtrent gaan meer en meer signalen op. – Intervention de Karel Van Hoorebeek, Annales parlementaires, Chambre, 13 juillet 1996, p. 85 – 2933.
[5] Le Vlaams Blok s’était abstenu lors du vote en commission considérant que la proposition de résolution s’inscrivait dans la logique d’un État fédéral. Giuseppe PAGANO, Les résolutions du Parlement flamand pour une réforme de l’État, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1670-1671, 2000.
[6]Collega’s, de Volksunie had een eigen voorstel ingediend dat verder gaat dan de verzuchtingen van het Vlaams Parlement. Ik wil daarover heel duidelijk zijn. Onze partij vindt dat België momenteel vierkant draait. Er moet niet alleen werk worden gemaakt van de vijf prioriteiten die ook de CVP heeft onderschreven. Wij willen tot een confederaal systeem komen, waarin de deelstaten bevoegd zijn voor alle materies waarvoor zij bevoegdheid willen krijgen. In consensus kunnen zij dan besluiten welke beslissingen zij nog samen willen nemen. Een confederalisme dat werkelijk kadert in een Europees geheel van volkeren en regio’s en waarbij de achterhaalde structuren van 1830 worden aangepast. In die confederale logica willen wij ook een oplossing vinden voor het prangend probleem van Brussel waarop de heer Dewael daarnet terecht wees; een oplossing waarbij Brussel door beide gemeenschappen in dit land wordt bestuurd. Wij willen dat eveneens een oplossing wordt geboden aan het probleem van de Vlaamse vertegenwoordiging in Brussel. Daarvoor stelde zelfs de eerste minister zich borg, maar de CVP neemt ook hier een bocht van 180°. – Intervention d’Annemie Van de Casteele, Annales parlementaires, Chambre, 28 avril 1999, p. 342-11995.
[7] Wouter BEKE, Living Apart Together, Christian Democracy in Belgium, p. 142 sv, in Steven VAN HECKE & Emmanuel GERARD ed., Christian Democratic Parties in Europe since the end of the Cold War, Leucven University Press, 2004. – Boudewijn VANPETEGHEM, De Clerck stapt combattief naar CD&V-congres, in De Standaard, 28 septembre 2001. – W. MARTENS, Mémoires pour mon pays…, p. 406.
[8]Le VLD n’y va pas par quatre chemins, Belga, dans La Libre, 17 novembre 2002.
[9] Karel De Gucht, président du VLD, sur VTM le 6 novembre 2002. België is op termijn veroordeeld om te verdwijnen, in rook op te gaan, en dit, zonder intussen nog enige meerwaarde aan Vlaanderen bij te brengen.
[10] Anne TREFOIS et Jean FANIEL, L’évolution des partis politiques flamands (2002-2007), dans Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1971, 26, 2007.
[11]Le CD&V veut une révision radicale de la Constitution dans une perspective confédérale, dans L’Écho, 13 mars 2003.
[12]Le CD&V place son espoir de reconquête de l’électorat en Yves Leterme, dans L’Écho, 1er juillet 2003.
[13]Manifeste pour une Flandre indépendante dans l’Europe unie, Bruxelles, In de Warande, 2006.
[14] Luc BARBE, La N-VA expliquée aux francophones, p. 54,Namur, Etopia, 2019.
[15] Le CD&V annonce la couleur du confédéralisme pour les prochaines élections, dans L’Écho du 21 mars 2007.
[16] Dominique JOUCKEN, Il n’existe pas d’État confédéral, Interview de Hugues Dumont, dans L’Écho, 7 août 2007.
[17]Les réactions des politiques après la chute du gouvernement, Belga, dans La Libre, 27 avril 2010.
[18] Jean-Paul BOMBAERTS, L’Open VLD met le cap sur le confédéralisme, dans L’Écho, 25 mai 2010
[19] Christophe DE CAEVEL, Le diable confédéral avance masqué, dans L’Écho, 29 mai 2010.
[20]Pourquoi la N-VA choisit le confédéralisme, dans L’Écho, 4 janvier 2013. – Quel est le confédéralisme prôné par la N-VA ? dans L’Écho, 6 janvier 2013.
[21] Jan VELAERS, Quel avenir pour la Belgique, dans Annemie SCHAUS et Marc UYTTENDAELE, La sixième réforme de l’État (2012-2013), Tournant historique ou soubresaut ordinaire ?, Bruxelles, Centre de Droit public – Anthemis, 2013. – voir aussi J. VELAERS, Federalisme / confederalisme… en de weg ernaartoe, Brussels, Koninklijke Vlaamse Academie van België, 2013. – François BRABANT, Faut-il craindre le confédéralisme, dans Le Vif, 28 mai 2010.https://www.levif.be/actualite/belgique/faut-il-craindre-le-confederalisme/article-normal-145535.html – Bart MADDENS, La Belgique à la croisée des chemins : entre fédéralisme et confédéralisme, dans Outre-Terre, 2014/03, n°40, p. 251-261.
[22] Ian BURUMA, Le Divorce, in The New Yorker, January 10, 2011, 36. Interview de Bart de Wever.
[23]N-VA, Verandering voor Vooruitgang, Congresteksten,31 Januari – 1 & 2 Februari 2014, Antwerpen, 2013. 76 p.
[24] Christophe DE CAEVEL, Bart De Wever abat ses cartes confédérales, dans L’Écho, 31 octobre 2013. – L’objectif confédéral de la N-VA, dans L’Echo, 29 octobre 2013. – Christian DE VISSCHER et Vincent LABORDERIE, Belgique : stop ou encore ? Entre fédéralisme, confédéralisme et séparatisme, dans Politique étrangère, n° 4, 2013, p. 23-35. – Eric STEFFENS, La N-VA donne sa définition du confédéralisme, VRT-NWS, https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2013/10/30/la_n-va_donne_sadefinitionduconfederalisme-1-1766676/
[25] Benoît MATHIEU, Voici à quoi ressemble le confédéralisme à la sauce N-VA, dans L’Écho, 15 janvier 2016. – La confédération belge selon la Nieuw-Vlaamse Alliantie, dans L’Écho, 19 janvier 2019.
Ce 4 octobre 2019 encore, lors de l’émission radio CQFD, le journaliste François Brabant interagissait avec son collègue Arnaud Ruyssen de la RTBF sur l’impossible équation fédérale. Pour le rédacteur en chef de Wilfried Magazine, un parfum de confédéralisme règne sur le débat politique belge. Mais, ajoutait-il, le confédéralisme, je pense que cela n’adviendra pas et que personne ne sait vraiment ce que c’est, le journaliste assimilant ensuite le confédéralisme au séparatisme. Ainsi entre-t-on dans un mode de réflexion binaire : fédéralisme ou séparation. Ce positionnement est caractéristique d’une bonne partie des observateurs, mais aussi des acteurs wallons et bruxellois francophones de la vie politique belge.
Il suffit pourtant d’ouvrir un livre récent de science politique pour y lire que le séparatisme ne se confond pas avec le confédéralisme. (…) Dans le confédéralisme, observent quelques-uns des plus brillants politologues belges contemporains, des États indépendants maintiennent des liens institutionnels entre eux. Parler de confédéralisation (comme le font certains partis politiques en Belgique) consiste à dire que toutes ou certaines entités fédérées se muent elles-mêmes en États indépendants, demeurant toutefois liés entre eux dans une structure commune qui n’est plus celle d’un État, mais bien d’une organisation internationale [1] . Voici quelques années, certains journalistes ont d’ailleurs également tenté de clarifier le concept. Observant que les termes “fédéralisme”, “confédéralisme” ou “séparatisme” reviennent régulièrement dans les discussions communautaires en Belgique, L’Écho notait en 2002 qu’en Belgique, le confédéralisme sert à désigner deux ou trois entités (Flandre, Wallonie, Bruxelles) qui créeraient une union sur des matières limitées (Affaires étrangères, etc.) [2] . Dès lors, qu’est-ce qui rend l’utilisation du concept de confédéralisme si difficile ?
Qu’est-ce qui rend l’utilisation du concept de confédéralisme si difficile ?
Probablement et avant tout l’absence de mémoire et le déficit de connaissance historique. Qui se souvient de cet éditorial de L’Écho du 27 janvier 2001 qui, saluant les accords du Lambermont conclus quelques jours auparavant comme une étape marquante, notait qu’il est clair qu’on est aujourd’hui dans un schéma confédéral dont on n’ose prononcer le nom de peur d’effaroucher celles et ceux (qui forment d’ailleurs toujours la majorité dans ce pays) qui refusent ce type de structure vidant l’État de sa substance, voire de sa raison d’être[3]. Six mois plus tard, le même quotidien évoquait la réforme conclue par la loi spéciale du 13 juillet 2001, en tant que prémices de confédéralisme, (…) dernière étape avant le confédéralisme [4]. La peur d’effaroucher, ici pointée, est essentielle. Faire peur a toujours constitué une arme politique redoutable.
Il faut rendre d’emblée à la députée libérale flamande Annemie Neyts-Uyttebroeck, la maternité d’avoir, lors d’un débat à la Chambre, le 18 janvier 1993, qualifié le confédéralisme de spectre institutionnel (institutionele spook) [5]. La formule nous paraît particulièrement adéquate. En français, le mot spectre renvoie depuis le XVIe siècle à l’apparition, qui fait plus ou moins peur, d’un fantôme, d’un mort, avec, étymologiquement, l’idée de spectacle, de simulacre, de fausse idée, de vision vague et effrayante. Par métaphore, le spectre est un objet qui épouvante [6]. Freddy Terwagne lui-même avait utilisé cette formule en 1970 lorsqu’il défendait son projet de réforme de l’État. Le 18 juin de cette année-là, le ministre wallon des Relations communautaires avait en effet dit aux sénateurs que plutôt d’agiter le spectre d’une Belgique fédérale, (…), il fallait considérer que l’État que nous allons créer, communautaire et régionalisé, n’est pas un État fédéral et (qu’) un fédéraliste doit être à l’aise pour le souligner [7]. Ainsi, qualifier la réforme de l’État a toujours été difficile. Pour obtenir l’adhésion des parlementaires, les ministres des réformes institutionnelles ont souvent minimisé l’ampleur des transformations, évitant les mots qui, comme fédéralisme, risquaient d’effrayer leurs auditeurs. Selon le député alors social-chrétien François Persoons (1925-1981), telle qu’elle a été pensée différemment de chaque côté de la frontière linguistique, la réforme des institutions de l’État était, au moins au départ, porteuse, d’une part, d’une sorte de confédéralisme culturel à deux, et, d’autre part, d’une forme de fédéralisme économique à trois [8].
Politiquement, il est intéressant de noter – et nous y reviendrons – que l’occurrence du mot confédéralisme se multiplie dans les milieux politiques belges à partir de 1988, au moment où comme l’écrit alors Xavier Mabille, le mot fédéralisme est désormais exorcisé en Belgique[9]. Jusqu’alors, écrivait le directeur général du CRISP, il était brandi comme une revendication par les uns, comme un repoussoir par les autres, il a ensuite accompagné des conversions, assorties ou non de réserves et d’interprétations, avant de donner lieu à désamorçage par le discours officiel, voire à des tentatives de récupération par des unitaristes qui se sont résolus à employer le mot à leur tour[10]. Même si sa figure plane depuis plus longtemps sur la réforme de l’État [11], le confédéralisme prend pleinement son sens de spectre en 1993 lors de la discussion de l’article 1er de la nouvelle Constitution affirmant que la Belgique est un État fédéral, qui se compose des communautés et des régions. Dès lors, le mot confédéralisme remplace le fantôme du fédéralisme à côté de celui du séparatisme, dont il est l’ombre, au rayon des épouvantails, ces objets qui inspirent de vaines et excessives terreurs… Le sociologue louvaniste Jacques Leclercq (1891-1971) ne disait-il pas que la peur est de tous les sentiments celui qui trouble le plus profondément l’esprit ? [12]
Ferments fédéraux ou confédéraux de la réforme de l’État ?
Déjà, fin 1988 début 1989, le côté symbolique de la qualification de l’État belge avait été identifié par Hugues Dumont. Le professeur de Droit constitutionnel à l’Université Saint-Louis l’avait fait après une journée de colloque dans lequel les interventions de ses collègues, d’une part de Karel Rimanque (1942-2008) de l’Université d’Anvers et de l’autre, de Francis Delpérée de l’UCL, avaient divergé sur la question de savoir si la réforme de l’État menée depuis 1970 contenait des ferments fédéraux ou confédéraux. Le professeur de Louvain dénonçait sans les nommer les courants (qui) soutiennent que, dès à présent, les structures de l’État belge sacrifient pour une part à la philosophie confédérale et qu’à plus long terme, elles gagneraient à être tout entières aménagées dans cette perspective [13]. Or, poursuivait Francis Delperée, préconiser l’instauration d’une confédération d’États en Belgique, c’est donc lutter, consciemment ou inconsciemment, pour l’indépendance de la Wallonie, de la Flandre, de Bruxelles ou d’autres entités encore. De son côté, le professeur à l’Université d’Anvers estimait que, depuis 1970, la Belgique se caractérise par un processus de décision confédéral au niveau central, en mettant notamment en évidence la parité entre francophones et néerlandophones au Conseil des Ministres [14]. Tout en nuançant les arguments des deux premiers professeurs, Hugues Dumont se disait d’accord avec Francis Delperée pour souligner la distance qui sépare “la voie fédérale” de la voie confédérale. Mais, ajoutait le professeur à Saint-Louis, si le fossé est profond, en Belgique, il n’en est pas moins toujours étroit, (…), en fonction du caractère fondamentalement dualiste du rapport des forces [15].
Ce n’était pas la première fois que Karel Rimanque ouvrait ce débat. Il l’avait déjà engagé avec plusieurs de ses collègues en 1974-1975 à la demande du ministre Robert Vandekerckhove (1917-1980), artisan avec François Perin de la régionalisation provisoire [16]. En 1993, il reviendra encore sur cette question lors des journées d’étude consacrées à “la Belgique fédérale”, organisées par le Centre d’Études constitutionnelles et administratives de l’Université catholique de Louvain. Ce fut pour Rimanque l’occasion de montrer que le fédéralisme belge a plus de caractéristiques confédérales qu’on n’a souvent le courage de l’admettre [17]. Le professeur à l’Universitaire Instelling Antwerpen y pointait la règle de l’unanimité ou encore la majorité très qualifiée nécessaire pour décider parmi les différentes composantes de l’État. Il notait d’ailleurs que ces composantes ne devaient pas nécessairement être des États souverains au plan international en rappelant l’exemple de la République des Provinces unies des Pays-Bas, de 1579 (l’Union d’Utrecht) à 1795 (l’intégration dans le système républicain français). Ainsi, le constitutionnaliste considérait-il que la parité au Conseil des ministres (Article 86bis) ressemblait à une conférence diplomatique et donc davantage à un système confédéral qu’à un gouvernement fédéral. De même, observant le système législatif, Karel Rimanque soulignait que la loi ne pouvait être adoptée, en fait ou en droit, qu’avec l’assentiment des représentants des deux grandes communautés. Le constitutionnaliste estimait de plus que la pratique d’accords de coopération dans le domaine des négociations de traités et de la représentation de la Belgique dans les organes internationaux pouvait laisser penser que le stade du fédéralisme était déjà dépassé [18]. Karel Rimanque en concluait que le fédéralisme belge reconnaît le droit de veto des grandes communautés non seulement au niveau de leur entité fédérée, mais aussi pour la mise en œuvre de politiques restées fédérales : la Belgique évolue, écrivait-il, dans une direction qui présente quelque analogie avec les systèmes de décision pratiqués dans une confédération [19].
Alors que, dans ce début du XXIe siècle, nombre de juristes et de constitutionnalistes belges francophones dénoncent le confédéralisme comme un objet flou [20] et étranger à notre tradition politique, l’historien observe que ce mode d’organisation fait vraiment partie de l’histoire de Belgique et, n’en déplaise à certains, de la Wallonie [21]. Longtemps d’ailleurs, probablement jusqu’en 1993, il sera intimement lié au concept de fédéralisme, avec parfois, quelques efforts pour en établir les nuances. C’est ce que nous verrons dans les deux articles suivants, considérant le lien confédéral dans l’histoire de la Wallonie, et donc aussi en partie dans celle de la Belgique, de 1790 à nos jours, avant et après 1945. Un quatrième papier s’intitulera Ce confédéralisme qui vient… Il me permettra de dire pourquoi je partage l’opinion de Hervé Hasquin lorsqu’il observait, le 13 octobre 2000, que l‘État belge va encore muter. Et l’historien wallon d’estimer alors que, dans un délai sur lequel il ne voulait pas se prononcer, la Belgique ne sera plus un État fédéral, mais un État confédéral, ajoutant que : c’est du cousu main [22].
Cette dernière expression signifie qu’il s’agit d’une entreprise qu’on est sûr de réussir. Ce qui rappelle à quel point ceux qui s’y opposent obstinément mènent une tâche difficile.
[1] Thierry BALZACQ, Pierre BAUDEWYNS, Jérôme JAMIN, Vincent LEGRAND, Olivier PAYE, Nathalie SCHIFFINO, Fondements de science politique, p. 122, Louvain-la-Neuve, De Boeck, 2014. – Ce texte trouve son origine dans une note préparatoire à mon passage à l’émission Au bout du jour, réalisée par Eddy Caekelberghs sur la Première de la RTBF et diffusée le 5 juin 2019.
[2]Une affaire de vocabulaire, dans L’Echo, 21 décembre 2002. Nous aurions ajouté l’OstBelgien dans la parenthèse…
[3]Lambermont : une étape marquante !, dans L’Echo, 27 janvier 2001.
[4]Lambermont : une nouvelle réforme de l’État et des prémices de confédéralisme, dans L’Echo, 12 juillet 2001. – Les accords du Lambermont sonnent comme la dernière étape avant le confédéralisme (ou le séparatisme), dans L’Echo, 26 mars 2003.
[5]Er wordt nu een akkoord besproken dat geen enkel van de institutionele spoken heeft doen verdwijnen, integendeel. Omdat men heeft geweigerd te spreken over de fundamentele aanpak lezen wij nu inderdaad scenario’s over het einde van België, lezen wij verwijzingen naar het separatisme, het confederalisme, de splitsing van de sociale zekerheid, Voeren en zijn statuut, kortom alle institutionele spoken zijn meer springlevend dan ooit voorheen. Annales parlementaires, Chambre, 18 janvier 1993, p. 22-753.
[6] Alain REY dir., Dictionnaire historique de la langue française, t. 3, p. 3613, Paris, Le Robert, 2006.
[7] Intervention du ministre Freddy Terwagne, en charge des affaires institutionnelles, dans Annales parlementaires, Sénat, session 1969-1970, 18 juin 1970.
[8] Intervention de François Persoons, Annales parlementaires, Chambre, 23 juillet 1970, p. 29.
[9] Xavier MABILLE, La faille du compromis, dans Marc UYTTENDAELE dir., A l’enseigne de la Belgique nouvelle, Bruxelles, Numéro spécial de la Revue de l’ULB, 1989/3-4, p. 65. – On trouve la même analyse en 1997 chez Marc BERTRAND, représentant du président du PSC Charles-Ferdinand Nothomb, au débat Quel avenir pour la Belgique à l’horizon 2000 ?, dans Jacques LEMAIRE et André MIROIR, La Belgique et ses nations dans une nouvelle Europe, p. 28, Bruxelles, La Pensée et les hommes, Editions de l’Université de Bruxelles, 1997.
[11] André ALEN, Poging tot een juridische begripsomschrijving van unitarisme, centralisatie, deconcen tratie, decentralisatie, regionalisme, federalisme en confederatie, Heule, UGA, 1975.
[12] Cité en exergue de Christian FRANCK ea, “Choisir l’avenir”, La Belgique en 1999, Bruxelles, Luc Pire, 1997.
[13] Francis DELPEREE, La voie fédérale, dans Hugues DUMONT ea dir., Belgitude et crise de l’Etat belge, p. 60, Bruxelles, Facultés universitaires Saint-Louis, 1989. – Ce texte a été également publié dans Journal des Tribunaux, 7 janvier 1989, p. 2-3.
[14] Karel RIMANQUE, Réflexions concernant la question oratoire : y a-t-il un Etat belge ?, dans H. DUMONT ea dir., Belgitude… p. 67.
[15] Hugues DUMONT, Etat, Nation et Constitution, De la théorie du droit public aux conditions de viabilité de l’Etat belge, dans H. DUMONT ea dir., Belgitude et crise de l’Etat belge, p. 109.
[16] Jan de MEYER, André MAST, Karel RIMANQUE, Paul VERMEULEN, De Hervorming van de Staat, Speciaal Nummer van Tijdschrift voor Bestuurswetenschappen en Publiekrecht (TBP), Jahrgang 1975, s. 327sv. – Peter HÄBERLE, Jahrbuch des Öffentlichen Rechts des Gegenwart, Neue Folge, Band 34, p. 168sv, , Tübingen, Mohr, 1985.
[17] Karel RIMANQUE, Le confédéralisme, dans Francis DELPEREE, La Constitution fédérale du 5 mai 1993, p. 31sv, Bruxelles, Bruylant, 1993.
[20] Notons que ce reproche d’objet flou ou en tout cas de définition floue du concept sur le plan juridique s’adresse également au fédéralisme. Voir Olivier BEAUD, Théorie de la fédération, p. 12, Paris, PuF, 2007.
[21] Voir aussi l’analyse de Peter De Roover chef de groupe NVA à la Chambre : Je sais que le confédéralisme est souvent perçu comme un projet flamand. A tort, selon moi. Cité dans : Le confédéralisme apportera une nouvelle dynamique à la Wallonie”, dans L’Echo 16 mars 2019.
[22]Hasquin : “On va vers le confédéralisme”, dans L’Echo, 13 octobre 2000.
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