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Charleroi, le 11 août 2014

Des amis ont attiré mon attention sur un récent ouvrage rassemblant d’anciens articles de Jean Stengers concernant la Guerre 1914-1918, dans lequel l’historien évoque l’attitude de Jules Destrée pendant l’Affaire Dreyfus, simplifiant un positionnement complexe et provoquant à nouveau de douteux amalgames. La question de l’antisémitisme chez Destrée est comme celle de l’existence du monstre du Loch Ness : elle réapparaît régulièrement, surtout en été, quand les médias n’ont guère de sujet de politique intérieure à traiter ou quand certains polémistes préparent la rentrée en tentant de discréditer une des personnalités wallonnes les plus emblématiques du XXème siècle. Jeune historien, j’avais abordé cette problématique dans une conférence à la société Dante Alighieri, au Musée du Verre à Charleroi en février 1986, intitulée Jules Destrée et l’’Italie : à la rencontre du national-socialisme. Ce premier texte a été édité dans la Revue belge d’Histoire contemporaine, à l’initiative de José Gotovitch, dans le volume XIX, 1988, 3-4, p. 543-585. Cette problématique a rebondi quelques années plus tard, en 1995, après la publication du livre d’Anne Morelli sur « Les grands mythes de l’histoire de Belgique », contenant un article de son collègue Jean-Philippe Schreiber qui reprenait des thèses de Marcel Liebman sur le député de Charleroi. J’y ai répondu à l’époque (voir note 29). En 2000, la Fondation américaine Beitler, le Centre d’Action laïque de Charleroi et les Territoires de la Mémoire de Liège, ont fait tourner une exposition sur l’Affaire Dreyfus et m’ont demandé un article concernant la position de Jules Destrée à l’égard de la question juive, afin de le publier dans le catalogue de l’exposition : L. Beitler (dir.), L’Affaire Dreyfus, Les voix de l’honneur, Catalogue de l’exposition des œœuvres et des documents de la Fondation Beitler (Charleroi, 4 avril-5 mai 2000, Liège, 15 mai-15 juin 2000, p. 33-46, Charleroi, Centre d’Action laïque / Liège, Territoires de la Mémoire, 2000). Je publie cet article ici, afin qu’il soit à le disposition de chacune et chacun. Il me paraît en effet que dans le contexte international actuel, il est bon de rappeler que Jules Destrée a eu des positions remarquables qu’on ne saurait réduire à celle de l’année 1898. Autant le rappeler ici.

1. La Révolution dreyfusienne

L’affaire Dreyfus fut une révolution analogue à 89 et 48, c’est-à-dire un cyclone emportant les gens là où ils ne se doutaient pas qu’ils allaient [1]. Cette formule, datée du 12 avril 1910, du théoricien socialiste révolutionnaire français Georges Sorel est particulièrement pertinente tant elle illustre le bouleversement politique qu’a constitué La Révolution dreyfusienne, pour reprendre le titre d’un ouvrage de Sorel, publié l’année précédente [2]. Ainsi, l’affaire Dreyfus va être à l’origine d’un débat d’une ampleur considérable qui, comme l’a indiqué l’historien Zeev Sternhell, va s’élever, du moins en France, jusqu’à une réflexion sur les principes généraux de la philosophie politique.

Pendant plusieurs années le pays tout entier vit avec intensité un débat de portée universelle. Peu nombreuses sont les nations qui peuvent inscrire à leur actif le fait d’avoir transformé, au-delà des considérations politiques, une iniquité judiciaire en un cas de conscience national. Moins nombreuses encore sont celles qui peuvent s’enorgueillir d’avoir fait reculer la raison d’État au nom d’un certain nombre de principes universels [3].

En 1894, l’officier juif français Alfred Dreyfus est condamné par le Conseil de Guerre à la déportation perpétuelle, accusé d’avoir livré des documents à l’Allemagne. La France se divise sur la question de sa culpabilité. L’antisémitisme qui s’affirme alors est un mouvement profond, déjà installé, populaire et anticapitaliste. Edouard Drumont et ses amis nationalistes établissent la distinction entre deux capitalismes de nature différente : celui du Juif, spéculateur en Bourse, du capital financier, et celui du Français, créateur du capital-travail, facteur-clef de la production, de la richesse collective, créateur d’emplois. Cet antisémitisme social se trouve une fonction d’intégration et de mobilisation de toutes les classes de « bons Français », pour refaire l’unité de la France contre le Juif « payé par l’Allemagne et source de discorde », dit-on. Cette analyse doit permettre au nationalisme d’apparaître comme la doctrine du consensus national : c’est la doctrine du « faisceau », ainsi nommé dès 1894, par le marquis de Morès.

Un rapprochement s’opère, dans une même révolte contre l’ordre établi, ressentie par une grande coalition dans la lignée du boulangisme de Maurice Barrès, qui désire l’éclatement des cadres politiques traditionnels et l’effacement des vieilles divisions. De nombreux socialistes, continuateurs de Proudhon, blanquistes et anciens communards, vont développer l’idée d’un antisémitisme progressiste. Le choc a lieu au moment où Jean Jaurès et la social-démocratie, après des hésitations, prennent parti pour Dreyfus et volent au secours de la République bourgeoise en péril, face à l’agitation des nationalistes.

Pourquoi ces hésitations du socialisme à venir au secours de Dreyfus ? Premièrement, car l’antisémitisme y est presque une tradition depuis Proudhon – qui s’est déchaîné contre les Juifs après que Karl Marx a écrit Misère de la Philosophie, pour attaquer les idées contenues dans la Philosophie de la Misère du premier. Marx est le « ténia du socialisme », dit Proudhon. Deuxièmement, cet antisémitisme vient de Marx lui-même. Zeev Sternhell note que le problème de l’antisémitisme chez Marx n’est pas simple [4] et que sa conception du judaïsme est indissociable de sa conception de l’Etat libéré de la religion, de son désir de voir disparaître l’aliénation religieuse et de voir l’homme s’émanciper. Pour l’historien israélien, on a tort d’imaginer que ce sont les Juifs qu’il pourfend, quand Marx n’a pour but que sa volonté de démolir à coups de marteau l’idéalisme hégélien. Car c’est incontestablement à la société bourgeoise que Marx s’attaque. Il est vrai que, ce faisant, il a plus que sérieusement contribué à enraciner l’amalgame judaïsme-bourgeoisie. Cet amalgame qui n’est pas de son invention, constituait alors le thème constant de la littérature progressiste de l’époque et était l’arme essentielle du combat contre l’argent [5] Et Zeev Sternhell note que c’est dans cette perspective que les collaborateurs de la revue l’Humanité nouvelle, Sorel, Vandervelde et d’autres, jugent opportun d’éditer, en novembre 1898, le texte de Marx sur La Question juive [6].

2. Zola, Jaurès et Jules Destrée

Le 1er décembre 1897, Emile Zola peut écrire, dans Le Figaro, que Pas un homme de nos Assemblées n’a eu un cri d’honnête homme, ni un modéré, ni un radical, ni un socialiste. Aucun de ceux qui ont la garde des libertés publiques ne s’est encore levé contre, pour parler selon sa conscience [7]. A ce même moment, l’ex-capitaine Alfred Dreyfus est pourtant au bagne de l’île du Diable, au large de Cayenne, depuis près de trois ans. On a oublié aujourd’hui le temps où Jean Jaurès et Georges Clémenceau regrettaient qu’on n’ait pas fusillé Dreyfus, on a oublié qu’il fallut les convaincre un à un, les chapitrer à part [8]. L’historienne Madeleine Rebérioux soulignait en 1985 que, sur le plan du socialisme international, on ne dispo­sait d’aucun relevé sérieux des prises de position et des ana­lyses pendant l’Affaire, ce qui, écrivait-elle, facilite évidemment les indignations et les enthousiasmes [9].

Jean Jaurès, lui-même, n’évolua progressivement que dans les dernières semaines de 1897 [10]. C’est le 13 janvier qu’Émile Zola écrit son J’accuse !, dans L’Aurore de Georges Clémenceau. Le 18 janvier, trente-deux députés socialistes français – dont Jaurès – publient un manifeste dans lequel ils se désintéressent du sort de Dreyfus, qu’ils considèrent essentiellement comme bourgeois. Le 22 janvier, Jaurès écrit encore, dans La Petite République, que derrière Zola, derrière son initiative hardie et noble, toute la bande suspecte des écumeurs juifs marche, sournoise et avide, attendant de lui je ne sais quelle réhabilitation indirecte, propice à de nouveaux méfaits [11]. C’est l’abstention que prône aussi Jules Destrée, le jeune député socialiste de Charleroi, dans une lettre qu’il adresse à Zola et qu’il fait publier par Le Peuple du 29 janvier 1898 [12].

S’adressant à Emile Zola, Jules Destrée annonce d’emblée que le défenseur de Dreyfus ne verra pas son nom parmi les écrivains, les avocats et les étudiants enthousiastes qui vont le soutenir. Ensuite, le député de Charleroi précise que, d’une part, ce n’est pas Zola qu’il met en cause – puisque, souligne-t-il, il a, à de nombreuses reprises, magnifié son talent – et, d’autre part, Jules Destrée s’est lui-même, comme avocat, fait le défenseur des persécutés. Destrée rappelle d’ailleurs que l’affaire Falleur, pour ne parler que de celle-là, m’a laissé peu de confiance sur l’infaillibilité des décisions judiciaires et que son premier acte à la Chambre belge fut de présenter un projet de loi sur la réparation de ces lamentables erreurs.

Venant à l’action de Zola dans l’affaire Dreyfus, Destrée commence par rendre hommage au courage de l’écrivain, avant de s’interroger sur l’opportunité de la démarche de l’auteur des Rougon-Macquart:

Je ne méconnais point la beauté de votre attitude ; il y a eu une indéniable crânerie, à se jeter dans la lutte, au moment où la bataille semblait perdue et à faire converger brusquement sur soi tant de sottes colères et de menaçantes tempêtes. Ce fut, au moment où vous l’avez fait, d’une telle bravoure que le monde entier, habitué aux platitudes et aux veuleries contemporaines, fut saisi d’étonnement.

Les âmes chevaleresques s’exaltèrent ; et, par ce coup d’éclat, la cause de Dreyfus fit de précieuses conquêtes qu’elle n’aurait jamais pu espérer. Mais, une fois passée la séduction qu’exerce tout acte viril, il est permis de se demander si un tel courage, un tel talent, ne se sont point, quand même, mépris.

Soulignant qu’il n’a pas encore d’idée bien arrêtée sur la culpabilité de Dreyfus, Jules Destrée estime toutefois que la condamnation elle-même de l’officier français constitue une probabilité assez forte de cette culpabilité : car étant donné la puissance incontestée des Juifs, l’intérêt énorme qu’ils avaient à l’acquittement, la facilité d’obtenir d’un Conseil de Guerre jugeant à huis clos tout ce que veut le pouvoir, l’esprit de corps des officiers qui les incite à cacher leurs méfaits mutuels, il me paraît très vraisemblable que, si l’acquittement eût été possible, on l’eût prononcé. Je concède, d’autre part, très volontiers, que l’acte d’accusation est d’un bête à faire pleurer et que toute preuve résultant d’une expertise en écritures est extrêmement fragile et suspecte.

Destrée, qui s’étonne des soutiens acquis à Dreyfus – qui n’auraient pas été apportés à tant d’anarchistes condamnés dans des conditions scandaleuses – s’interroge sur les efforts extraordinaires déployés pour sauver le capitaine et, du même coup, justifie son abstention, avec une virulence et des termes, qui, en d’autres temps et détachés de leur contexte, lui auraient assurément – et fort heureusement – valu à lui-même un procès et une condamnation. L’extrait suivant, pour ces raisons, mérite d’être cité tout entier.

C’est qu’il y a dans la cause que vous avez entrepris de défendre, autre chose que le salut du Droit et le trophée de la Justice. Ceux qui paient les frais énormes de cette campagne, ceux qui, usant de la vénalité de la presse, lancent chaque jour les plus fantastiques nouvelles à l’opinion désorientée, se soucient fort peu des nobles conceptions qui vous ont enflammés d’ardeur!

La vérité est que les Juifs sentent leur influence, leur prestige, leur caisse, en péril, et qu’ils cherchent à la sauver. Et c’est à cette besogne-là que je ne veux contribuer d’aucune manière.

Ne m’accusez point, pour ces paroles, d’antisémitisme sectaire. Je n’en veux point aux Juifs à raison de leur religion; ce serait assurément monstrueux. Ce que j’ai pu étudier de l’histoire me porte à penser que leur race a des facultés opposées et nuisibles à la nôtre, qu’elle ne paraît pas lui être assimilable aisément, si ce n’est à très longue échéance.

Je dois sans doute aimer l’humanité entière, mais cet amour ne peut m’empêcher de voir les inconvénients qui résultent de la juxtaposition de deux fractions, non identiquement évoluées, de cette humanité.

Mais ce que je vois surtout dans le mouvement qui se lève, malgré des erreurs, des déviations, des apparences superficielles qui peuvent égarer, c’est la guerre à L’ARGENT ACQUIS SANS TRAVAIL. Et dans ce sens, je suis antisémite, résolument. Le Juif a de merveilleux dons d’enrichissement. La spéculation est son triomphe, cette spéculation qui déplace stérilement les richesses, sans en créer jamais. Je ne suis pas fâché que cela soit mis en évidence. Je considère comme très salutaire que la classe ouvrière puisse comprendre qu’une combinaison de bourse peut amener de terribles baisses de salaire et des grèves comme des désastres. Je suis très heureux de voir dénoncer à l’opinion l’immoralité de ces richesses colossales, leur abominable emploi, la nécessité de restitutions prochaines.

L’antisémitisme a cela de bon. Il a même ceci d’excellent : c’est qu’au jour des liquidations qui s’approchent, le peuple ne distinguera pas entre le banquier juif et le financier catholique, et fera rendre gorge indistinctement à toutes les sangsues avides qui se sont gorgées de son sang, à tous les capitalistes rapaces, qui sans travailler, auront amassé des fortunes en faisant travailler les autres.

L’antisémitisme porte dans ses flancs l’anticapitalisme, et c’est pourquoi les conservateurs cléricaux se montrent si réservés : ils admettraient bien qu’on exproprie les Juifs, mais ils appréhendent justement ce jour-là, en vertu des prémisses posées par eux-mêmes, où on leur demandera des comptes analogues.

Voilà ce que je voudrais signaler à mes amis socialistes qui sont tentés à vous acclamer, ne fut-ce que par esprit de réaction contre vos insulteurs de sacristie : il faut qu’ils se gardent de transformer ce passionnant débat en une question cléricale : c’est autrement profond et autrement intéressant pour nous! Il faut se méfier des emballements généraux car, on l’a remarqué depuis longtemps, les Juifs, lorsqu’ils ne peuvent acheter les consciences, savent admirablement faire appel aux profits de leurs intérêts, aux sentiments altruistes et nobles de ceux qu’ils veulent exploiter. Nous ne devrions jamais oublier qu’ils sont pour les principes de 89 – mais de 89 pour cent!

Excusez la longueur de cette lettre trop courte néanmoins pour toucher à de si graves problèmes et, quelque mince que soit mon opinion, pardonnez moi d’avoir cru, comme un devoir nécessaire de la dire ici.

Jules Destrée.

Cette prise de position, qui fait l’amalgame entre l’antisémitisme et l’anticapitalisme, est une faute politique de Jules Destrée. Ce faisant, le député de Charleroi reste attaché à la tradition d’antisémitisme social de tout le mouvement ouvrier – y compris de la démocratie chrétienne [13] –, depuis Pierre-Joseph Proudhon, Charles Fourier, Karl Marx, Gustave Defnet, Louis Bertrand, Jean Volders et tant d’autres, au moment où certains ont mesuré que cette doctrine était dépassée et ont entamé – souvent timidement – un changement de cap. Du reste, Jules Destrée, à la suite d’Edmond Picard et de Léon Hennebicq, prend le risque d’être assimilé à la grande partie de la droite catholique qui, depuis longtemps, se déchaîne contre les Juifs, particulièrement La Gazette de Liège, le Journal de Bruxelles et, à Namur, L’Ami de l’Ordre [14]. Sa position lui vaut également d’être mis en porte-à-faux à Charleroi même, où La Gazette de Charleroi a mis en évidence les appuis à l’auteur de J’accuse ! et qui souligne que ces manifestations consoleront facilement M. Zola de la défection des citoyens Picard et Destrée [15].

Au moment où, en France, se constitue la Ligue des Droits de l’Homme, le 9 février 1898, et en réponse à certaines prises de position au sein du Parti ouvrier – particulièrement sa Fédération bruxelloise –, Jules Destrée écrit un nouveau texte, publié dans Le Peuple le 12 février, sous le titre de Discipline et Liberté, article qui lui permet de préciser sa pensée :

Au sujet de l’antisémitisme, j’ai exprimé une conviction sincère et réfléchie ; je l’ai fait, comme un devoir, car il est toujours pénible de se séparer de ses amis. Je n’ai rien à y retrancher. Mais j’aimerais aussi que l’on n’y ajoutât rien. J’ai pu constater depuis dix jours, qu’on m’avait gratuitement prêté, pour les réfuter plus aisément, une série d’opinions que je n’avais jamais émises. L’ardeur de mes adversaires a été telle qu’aujourd’hui, lorsque je rapporte, sans y changer un mot, des phrases de cette lettre, j’ai l’air de reculer. Je n’aime pas avoir cet air-là, mais il faut pourtant bien que je demande à être jugé sur ce que j’ai dit, et non pas sur ce que l’on a cru, avec plus ou moins de bonne foi, que j’avais voulu dire.

Ainsi, mes amis du Parti ouvrier qui m’avez opposé la phrase qui nous proclame les défenseurs de tous opprimés, sans distinction de culte, sexe ou race, quand ai-je écrit, je vous prie, une ligne en opposition avec cette phrase? Ai-je eu un mot contre les opprimés juifs  (1)? Ai-je voulu exclure de votre sympathie et de votre solidarité les prolétaires d’Amsterdam ou de New-York, les révolutionnaires de Pologne? Où avez-vous vu cela?

J’ai parlé des Juifs en tant qu’OPPRESSEURS, en tant que détenteurs d’un capital gagné sans travail. Qu’il y ait à côté d’eux, des chrétiens ou des aryens grevés de la même tare, je ne l’ai point nié. Je n’ai pas demandé d’exproprier plutôt ceux-ci que ceux-là. Ni proposé des mesures d’exception. Ni crié, ni approuvé – comme m’en accuse la Gazette de Charleroi –, le cri sauvage de : « Mort aux Juifs! ». Mais j’ai dit à ceux qui ont compris l’importance historique de la lutte des classes qu’ils avaient tort de fermer les yeux sur la lutte des races. Jaurès, qu’on m’a opposé, se garde bien de nier qu’il y ait une question juive et Guesde, en comparant l’antisémitisme et l’anticléricalisme, me fournit un argument d’analogie : être exclusivement anti-clérical est étroit et absurde, mais refuser de propos délibéré de voir le péril clérical, est une absurdité pareille.

Je persiste donc à considérer l’antisémitisme, en tant que mouvement populaire comme une forme de socialisme, de même que, par exemple, la démocratie chrétienne. Formes inférieures, je ne le conteste pas, et que nous devons combattre pour ce qu’elles ont de rudimentaires, mais que nous pouvons approuver pour la part de vérité qu’elles apportent. Et c’est la complexité des aspects de ces phénomènes sociaux qui fera que, longtemps encore sans doute, des esprits, d’accord au fond, auront quelque peine à constater cet accord.

Jules Destrée.

(1) Qu’on ne m’objecte pas Dreyfus, puisque j’ai dit précisément que je ne le croyais pas opprimé. Ma manière de voir se modifierait toutefois, à cet égard, si les prétendues révélations de Mme Demange venaient à être confirmées. Et je soutiendrais alors l’opprimé, sans plus m’inquiéter de sa race [16].

Ce texte confirme donc, en le nuançant, un antisémitisme de principe et un refus de voir en Alfred Dreyfus la victime d’un nationalisme ancré tant à droite qu’à gauche et qui, après la mise en place temporaire d’un « front républicain » avec les socialistes français, va pousser une partie de ceux-ci, déçus, dans une dérive nationaliste révolutionnaire. Il faut, toutefois, être prudent dans les conclusions que l’on tire : l’historien Michel Winock souligne que l’Affaire Dreyfus ne met pas aux prises des citoyens honnêtes et des racistes, mais, comme le dit Maurice Paléologue, deux sentiments sacrés, l’amour de la Justice et la religion de la Patrie. De même, les engagements des dreyfusards – comme des antidreyfusards – ont des origines diverses, mimétisme, arrivisme, intimidation, reconnaissance envers un maître, hostilité envers un rival, relève Michel Winock [17].

3. Mars 1899 : le revirement de Jules Destrée

Dans L’Avenir social, l’hebdomadaire du Parti ouvrier belge, de mars 1899, Jules Destrée a dénoncé sa propre attitude à l’égard de l’Affaire Dreyfus :

[…] qu’on érige en principe la nécessité de l’opposition des intérêts de classe, qu’on proclame anathème tout ce qui vient de la bourgeoisie, qu’on déclare ne vouloir rien de commun avec elle, la théorie, ainsi poussée à l’extrême, devient funeste et rétrograde. On en a vu l’aboutissement étrange dans la décision d’ailleurs éphémère des marxistes de se désintéresser de l’Affaire Dreyfus, sous prétexte que les prolétaires français n’avaient pas à se préoccuper de ce débat entre bourgeois [18].

Ainsi, en parallèle avec de nombreux socialistes français, Jules Destrée a fait preuve d’antisémitisme pendant quelques mois, de janvier 1898 jusqu’en mars 1899, date à laquelle il notifie lui-même l’évolution de sa pensée. Il tire toutefois, dans le même article, des leçons plus générales de tolérance.

[…] Quant à nous, qui n’avons point de révélation divine à propager, mais seulement des révélations humaines, sans cesse révisables et perfectibles, gardons-nous sérieusement de ce travers. Ne créons point de dogmes et d’articles de foi. Admettons la discussion des maîtres les plus vénérés et des principes les moins contestés. Contrôlons-les sans cesse par l’observation des faits. N’oublions jamais qu’ils sont soumis, comme nous, à la loi de l’évolution, que tout arrêt est un recul ! Restons ouverts à toutes nouveautés, attentifs à toutes les rumeurs annonciatrices des temps à venir. Qu’il n’y ait point un socialisme fermé, sectaire, orthodoxe. Soyons tolérants pour ceux d’entre nous qui errent, puisque nous pouvons errer nous-mêmes. […] [19]

Ainsi, Jules Destrée avait-il erré de janvier 1898 à mars 1899 !

Les conférences qu’il allait donner lors de ses missions en Italie pendant la guerre 1914-1918 lui permettront d’aborder une nouvelle fois l’Affaire Dreyfus. Un de ces textes sera publié en conclusion de l’ouvrage Les Socialistes et la Guerre européenne, 1914-1915, édité en 1916 [20] et reproduit en 1929 dans un chapitre intitulé Socialisme et Internatio­nalisme, de son livre Introduction à la vie socialiste.

[…] Si le socialisme se réduisait à la question du salaire, ce serait une assez misérable doctrine, et l’on ne comprendrait plus le prestige qu’elle exerce sur les masses et l’élite. En France, lors de l’affaire Dreyfus, on a entendu des controverses ana­logues. Certains théoriciens farouches proclamaient que c’était une affaire de bourgeois, devant laisser indifférents les travail­leurs. Ils n’ont pas été suivis. Les travailleurs ont répondu qu’il ne pouvait leur être indifférent que fussent violées la Justice et la Vérité. A l’heure actuelle, il ne peut de même leur être indifférent de voir violer le Droit et la Liberté [21].

On peut certes regretter que Jules Destrée ne rappelle pas qu’il s’est trouvé, un temps, parmi ces théoriciens farouches. Cette prise de position est cependant importante, car elle montre que, contrairement à de nombreux dreyfusards, Destrée ne va pas suivre ceux qui, au sein du mouvement socialiste, vont voir dans l’Affaire Dreyfus une immense mystification et regretter d’avoir apporté leur secours à la République en péril. Ceux-là et d’autres vont dériver vers un socialisme national et révolutionnaire [22].

4. De Dreyfus à Auschwitz ?

On ne peut pas clore ici le dossier visant à établir une liaison entre Jules Destrée et l’antisémitisme sans évoquer une réponse précise à une question que posait René Henoumont en 1984 dans Pourquoi Pas ?, après avoir rendu compte du livre polémique consacré par Pol Vandromme au député de Charleroi [23] : L’antisémitisme de Destrée est de son époque. Il y a quasi un siècle. La seule vraie question est de savoir si Destrée aurait approuvé la déportation des petits-fils de Dreyfus à Auschwitz. Il y a des mots qui changent de sens au prix de millions de morts [24].

La question est pertinente. A ce jour, trois textes importants permettent de lui apporter une réponse.

D’abord, cette prise de parole du 26 mars 1933 à Charleroi où, devant les fédérations socialiste et intersyndicale du bassin, Jules Destrée manifeste à la fois son angoisse et sa volonté :

Ce qui se passe en Allemagne m’inquiète à un double point de vue. On tue nos amis parce que socialistes, les communistes parce que communistes. Le danger est que cette dictature s’étende par la force. […] Soyons de cœur avec tous les opprimés, communistes et autres. On massacre les Juifs, parce que juifs. Ils ont droit à notre appui. Quelles que soient la couleur, la race, la langue des hommes, ils ont droit à la liberté [25].

Ensuite, l’historienne de l’Université de Liège Isabelle Karolinski a mis en évidence le patronage que Jules Destrée apporte à un ouvrage – publié à Paris en 1934 – : cet ouvrage dénonce les persécutions des Israélites allemands par les hitlériens et met en évidence les dangers de la logique nazie de Mein Kampf. L’éditeur de La question juive, vue par 26 éminentes person­nalités y publie d’ailleurs la lettre de Jules Destrée du 19 janvier 1934, que Isabelle Karolinski reproduit elle aussi dans son travail :

J’ai bien reçu votre lettre du 18 janvier. Je ne puis qu’approuver la publication que vous annoncez. Avec un pareil Comité de patronage, ce volume ne pourra être que fort intéressant. Il vient à son heure, car les mouvements d’opinion que nous avons constatés en Allemagne rendent la question actuelle et de nature à faire réfléchir le monde entier [26].

Enfin, en Tribune libre du journal Le Soir du 7 septembre 1935, Jules Destrée lance un appel intitulé Pour les Juifs. Il y dénonce d’abord l’usage péjoratif qui est fait du nom Juif, en se portant en faux contre ce qu’il appelle des plaisanteries faciles et des accusations injustes. N’attendez pas de moi que je fasse chorus avec ces déclamations antisémites. Au contraire, je voudrais provoquer une réaction.

Dès lors, le député de Charleroi évoque le sort qui est réservé aux Juifs en Allemagne :

Ce qui se passe en Allemagne fait bondir d’indignation. Des hommes, des femmes, des vieillards sont boycottés, ridiculisés, insultés, frappés, poursuivis, traqués parce que Juifs. Une fausse science prétend réserver aux Allemands aryens les Droits de l’Homme et du citoyen. Les Juifs en sont exclus. Ils vivent dans l’insécurité perpé­tuelle. Ils sont sans droits, et s’ils se plaignent, aucune autorité protectrice ne les écoute – Au contraire !

Chose étrange : dans ce peuple germanique, dont on ne contestera pas la civilisation, pas une voix ne s’élève pour protester et rappeler les règles d’humanité et de liberté. Devant ces tristes événements, comme il est consolant le souvenir de l’abbé Grégoire, défenseur, à la Convention des Juifs et des Nègres, de tous les opprimés de l’époque ! Comment ne se trouve-t-il pas en Allemagne de voix de la même géné­rosité ! Cette comparaison suffit pour mesurer la valeur morale des deux peuples.

Ce qui surprend, c’est l’absence de protestation et de révolte. Le Juif, traqué et persé­cuté, n’a pas de défenseur et ne songe pas à se défendre. Une opinion publique égarée par la théorie absurde de la pureté de la race leur est plutôt hostile. Les professeurs d’université qui ont répandu ces idées néfastes sur la nécessité de purifier la race allemande de tout apport étranger sont, à l’origine, les auteurs respon­sables de tant d’injustices et de violences.

Récemment, à Berlin, un Juif qui avait eu une maîtresse allemande a été condamné à de la prison « pour avoir souillé la race allemande » et on l’a menacé, s’il recommençait, de stérilisation ! O honte !

Ces choses-là, qui font songer aux affreux pogroms russes, sont en contradiction avec l’enseignement du Christ, qui proclamait la fraternité et l’égalité de tous les hommes, avec la noble parole antique de Térence : « Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ». C’est, au milieu d’une civilisation étonnante par ses progrès techniques, la négation des principes immémoriaux de la morale humaine.

En présence d’une pareille humiliation du monde moderne, tout homme ayant le cœur à sa place devrait s’indigner et protester […]

Et Jules Destrée d’évoquer un livre de Pierre Goemaere intitulé Quand Israël rentre chez soi, enquête menée en Palestine sur le Foyer national juif, qui lui donne l’occasion d’aborder la question de l’antisémitisme. Jules Destrée commente :

De la part d’un écrivain catholique, ce qui a été écrit par M. Goemaere est courageux et constitue une juste réaction contre la haine et le mépris du Juif. Je ne sais ce que les antisémites pourront répondre de valable à ce loyal et franc examen de conscience.

J’en dirai autant de ses observations sur la façon dont la classe moyenne – lisez la bourgeoisie – considère le Juif. Elle proclame « qu’elle combat Israël parce qu’il est le destructeur de l’ordre établi, dont elle est, elle, la gardienne la plus sûre. A cette soif incessante de modifier, de remplacer, de [réinventer] qui est le caractère saillant d’Israël dans nos sociétés, elle oppose ses pondérations bourgeoises, son goût de la norme, sa méfiance des innovations. Le Juif est un perpétuel révolutionnaire ».

Ce grief de la bourgeoisie est pour nous un motif d’admiration et de sympathie. Car cette aspiration constante d’Israël vers un « temps – Dieu où le bonheur du genre humain sera réalisé dans l’égalité intégrale des individus » témoigne d’un idéalisme magnifique, nourri sans doute de chimères, comme le dit M. Goemaere, mais aussi de générosité.

Générosité, j’insiste sur ce mot de M. Goemaere. Il contredit l’accusation courante dirigée contre les Juifs d’être astucieux, intrigants, dénués de scrupules. M. Goemaere observe avec raison que le même reproche peut être fait à de nom­breux non-juifs. Au fond, ce reproche n’est qu’une manifestation de basse envie de médiocres qui n’ont pas réussi [27].

Conclusion : Destrée, philosémite humaniste de premier plan

Ainsi, Jules Destrée qui, lui-même, avait pris, au moment de l’Affaire Dreyfus, une position d’antisémitisme de principe, au nom même d’une position doctrinale proche d’un courant important du socialisme français, a exprimé dans les années trente des positions particulièrement fermes – si on les compare à l’opinion publique belge du moment – au profit de la communauté juive. Jetant au fossé ses propres formules douteuses anciennes sur le terme de juif – ou perçues comme telles par nos contemporains [28] il apparaît dès lors comme un philosémite humaniste de premier plan.

De nombreux auteurs ou publicistes ont, depuis vingt ans, analysé – souvent avec légèreté, parfois avec mauvaise foi [29] –, la position de Jules Destrée sur la question juive, en marquant souvent leur intention de le discréditer dans son engagement wallon, postérieur pourtant à l’Affaire Dreyfus. Dernièrement encore, dans un chapitre intitulé L’âge d’or, 1940-1944, de sa biographie d’Hergé publiée chez Plon à Paris, Pierre Assouline, traitant avec raison et sans ambages de l’antisémitisme du dessinateur de Tintin et de sa contribution au quotidien Le Soir « volé » pendant la guerre, n’hésitait pas à écrire à la page 157 de son texte et dans un raccourci intellectuel sans précédent :

Il est vrai que même Destrée, père spirituel du patriotisme wallon, prônait un antisémitisme racial, pour ne rien dire de l’avocat Edmond Picard, sénateur socialiste, chantre de l’Ame belge et théoricien violemment raciste. Avec tous les relents suspects qu’elle charrie, cette nouvelle aventure de Tintin correspond à l’air du temps.

Il est des mots qui changent de sens, écrivait René Hénoumont… En effet. Outre le fait que la position de Jules Destrée sur l’antisémitisme n’était pas la même en 1898 qu’en 1897, et que celle de 1935 était exemplaire, il faut rappeler, au delà de cet anachronisme flagrant, que Jules Destrée est décédé en janvier 1936, bien avant la Seconde Guerre mondiale. Humaniste, et philosémite.

Philippe Destatte

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[1] Lettre de Georges Sorel à Giuseppe Prezzolini, citée par Bruno SOMALVICO, Sorel et ses contemporains, dans Jacques JULLIARD et Schlomo SAND dir., Georges Sorel et son temps, p. 304, Paris, Seuil, 1985.

[2] Georges SOREL, La Révolution dreyfusienne, Paris, Bibliothèque du Mouvement socialiste, 1909.

[3] Zeev STERNHELL, Ni droite ni gauche, L’idéologie fasciste en France, p. 42, Paris, Seuil, 1983.

[4] Zeev STERNHELL, La Droite révolutionnaire, 1885-1914, Les origines françaises du fascisme, p. 187-188, Paris, Seuil, 1978.

[5] Ibidem.

[6] Zeev STERNHELL, La Droite révolutionnaire…, p. 187-188..

[7] Pierre MIQUEL, L’Affaire Dreyfus, p. 45, Paris, Presses universitaires de France, 1979.

[8] Charles ANDLER, La Vie de Lucien Herr (1864-1926), p. 148-149, Paris, Maspero, 1977.

[9] Madeleine REBERIOUX, La Place de Georges Sorel dans le socialisme au tournant du siècle, dans Jacques JULLIARD et Shlomo SAND dir., Georges Sorel…, p. 44.

[10] Madeleine REBERIOUX, Classe ouvrière et intellectuels dans L’Affaire Dreyfus : Jaurès, dans Les Ecrivains et l’Affaire Dreyfus, p. 189, Paris, PUF, 1983.

[11] Jean JAURES, La Petite République, 22 juin 1898, cité dans Un drame en cinq actes, dans L’Histoire, L’Affaire Dreyfus, Vérités et Mensonges, n° 173, janvier 1994, p. 8.

[12] L’Affaire Dreyfus, dans Le Peuple, 29 janvier 1898, p. 1. – Philippe DESTATTE, Jules Destrée et l’Italie, A la rencontre du national-socialisme, Conférence donnée le 25 février 1986 à l’ini­tiative de l’Association « Dante Alighieri » de Charleroi, sous les auspices de l’Institut italien de Culture de Bruxelles, dans Revue belge d’Histoire contemporaine, XIX, 1988, 3-4, p. 557.

[13] J.M. MAYEUR, Les Congrès nationaux de la démocratie chrétienne à Lyon (1896, 1897, 1898), dans J.M. MAYEUR, Catholicisme social et démocratie chrétienne, Principes romains, expériences françaises, p. 188-192, Paris, 1986.

[14] Isabelle KAROLINSKI, L’Antisémitisme en Belgique francophone, de « La France juive » d’Edouard Drumont au procès de Rennes, 1886-1899, , p. 202-213, Université de Liège, Faculté des Philosophie et Lettres (Histoire), Année académique 1981-1982. Lieven JAERENS, L’Attitude du clergé catholique belge à l’égard du judaïsme (1918-1940), dans Les Juifs de Belgique, De l’immigration au génocide, 1925-1945, p. 11-56, Bruxelles, Centre de Recherches et d’Etudes historiques de la Seconde Guerre mondiale, 1994.

[15] Les adresses à Emile Zola, dans Gazette de Charleroi, 31 janvier 1898, p. 2. A noter la présence d’Hector Chainaye et d’Albert Mockel parmi les signataires. – Pour le droit ! , dans Gazette de Charleroi, 2 février 1898, p. 1. – voir aussi Au Trio de la Resucée, dans Gazette de Charleroi, 7 février 1898, p. 1. – voir aussi MM. Mouton, Warnant et Bodart, dans La Meuse, 4 février 1898, p. 2. – L’Antisémitisme et le Parti ouvrier, dans La Meuse, 7 février 1898, p. 1.

[16] Jules DESTREE, Discipline et Liberté, dans Le Peuple, 12 février 1898, p. 2.

[17] Michel WINOCK, Une Question de principe, dans Pierre BIRNBAUM dir., La France de l’Affaire Dreyfus, p. 551-559, Paris, Gallimard, 1994.

[18] Jules DESTREE, Socialismes, dans L’Avenir social, n° 3, mars 1898, reproduit dans Semailles, p. 69, Bruxelles, Lamertin, 1913. – Philippe DESTATTE, Jules Destrée et l’Italie…, p. 557.

[19] Jules DESTREE, Socialismes, dans L’Avenir social, n° 4, avril 1899, reproduit dans Semailles, …, p. 83.

[20] Jules DESTREE, Les Socialistes et la Guerre européenne, 1914-1915, p. 134, Paris, Van Oest, 1916. – Jules DESTREE, Souvenirs des temps de guerre, édition annotée par Michel DUMOULIN, p. 212, Louvain, Nauwelaerts, 1980.

[21] Jules DESTREE, Introduction à la vie socialiste, p. 110-111, Bruxelles, L’Eglantine, 1929.

[22] Zeev STERNHELL, Ni droite, ni gauche, L’idéologie fasciste en France, p. 66sv., Paris, Seuil, 1983. – Philippe DESTATTE, Socialisme national et nationa­lisme social, Deux dimensions essentielles du national-socialisme, dans Cahiers de Clio, 93-94, p. 22, Liège, Printemps-Eté 1988.

[23] Pol VANDROMME, Destrée, La Lettre au Roi, p. 81-83, Bruxelles, Legrain, 1984.

[24] René HENOUMONT, Pol Vandromme, Destrée : la lettre au Roi, dans Pourquoi Pas ?, 12 décembre 1984, p. 170 et 175. – voir aussi A.M. [André MEAN], Destrée : la lettre au Roi, Un livre de Pol Vandromme qui risque de faire du bruit dans les milieux socialistes et les cercles wallons, dans La Libre Belgique, 20 novembre 1984, p. 3.

[25] Les fédérations socialiste et intersyndicale du Bassin de Charleroi ont consacré un grand débat sur la situation politique générale, Un discours de Jules Destrée, dans Journal de Charleroi, 27 mars 1933, p. 1.

[26] La question juive, vue par 26 éminentes personnalités, p. 209, Paris, E.I.F., Librairie Lipschutz, 1934. – Isabelle KAROLINSKI, L’Antisémitisme en Belgique francophone…p. 217.

[27] Jules DESTREE, Pour les Juifs [Tribune libre], dans Le Soir, 7 septembre 1935, p. 1.

[28] Par exemple en 1885, dans son journal : Est venu la semaine dernière passer la soirée avec moi le jeune peintre hollandais Is[aac] Israëls. Singulier petit bonhomme ! Très lettré, très artiste, mais Hollandais, mais juif… Il a un grand mérite : aimer Huysmans et admirer Zola. Jules Destrée, Journal, 1882-1887, Texte établi et annoté par Raymond TROUSSON, p. 371, Bruxelles, Académie royale de Langue et de Littérature françaises, 1995. – En 1920 : A Smolny, au Congrès des Soviets, Trotzky, le juif rusé, triomphe […] ; Il a vraiment grand air, ce juif famélique, au profil sarcastique. C’est un beau spectacle que de le voir vivre en ces semaines : il fait chaque jour un discours ou un article de journal, inspire un décret, décide mille affaires petites et grandes, avec une audace et une énergie infatigables. Il est le Souverain, dans Jules DESTREE, Les fondeurs de neige, Notes sur la révolution bolchevique à Pétrograd pendant l’hiver 1917-1918, p. 89 et 276, Bruxelles et Paris, Van Oest, 1920.

[29] Marcel LIEBMAN, Les Socia­listes belges, 1885-1914, La Révolte et l’organisation, coll. Histoire du Mouvement ouvrier en Belgique, p. 214-215, Bruxelles, Vie ouvrière, 1979. – Jean-Claude HENROTIN, La Pensée politique de Jules Destrée, Mémoire en Sciences politiques sous la dir. du Professeur M. LIEBMAN, p. 43-44, Université libre de Bruxelles, Année académique 1976-1977. – Jean-Philippe SCHREIBER, Jules Destrée entre séparatisme et nationalisme, dans Anne MORELLI, Les Grands mythes de l’histoire de Belgique, de Flandre et de Wallonie, p. 243-254, Bruxelles, Vie ouvrière, 1995. – Bernard PADOAN, Jules Destrée, patriote et raciste, dans Le Soir, 12 et 13 août 1995, p. 3. – Manuel ABRAMOWICZ, Wallon, socialo et antisémite, dans Regards, Revue juive de Belgique, n° 363, Bruxelles, 21 septembre 1995, p. 89. – Sur ces textes : Philippe DESTATTE, Jules Destrée, l’antisémitisme et la Belgique, Lettre ouverte à tous ceux qui colportent des mythes éculés sur les Wallons et leur histoire, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1995, 30 p.